Efficacité d’un complexe de biofertilisants à base de champignons sur la productivité de la tomate (Solanum lycopersicum) au Togo

Auteurs-es

  • Mèm TCHOKOZI Département de Production Végétale et Résilience Agricole, Ecole Supérieure d'Agronomie de l'Université de Lomé, Togo

DOI :

https://doi.org/10.5281/zenodo.10430937

Mots-clés :

tomate, biofertilisants, Champignons, productivité agricole.

Résumé

Pour relever les défis imposés par les pratiques conventionnelles de fertilisation en agriculture, l'utilisation de biofertilisants apparaît comme une meilleure alternative pour augmenter la productivité tout en préservant les ressources de production. Cette étude a été entreprise pour évaluer l'efficacité d'un complexe de biofertilisants à base de champignons sur la productivité de la culture de tomate. Le dispositif expérimental utilisé reposait sur un schéma en blocs complètement aléatoires avec quatre niveaux, chacun répété quatre fois: le traitement T0 (sans fertilisation), le traitement T1 (utilisation exclusive des biofertilisants), le traitement T2 (combinaison des biofertilisants avec 100 kg d'engrais 15-15-15 + 50 kg d'urée 46%), et le traitement T3 (200 kg d'engrais 15-15-15 + 100 kg d'urée 46%). Les paramètres évalués étaient la taille des plants, le nombre de fruits produits par plant et le rendement en fruits de la tomate. Les résultats obtenus ont montré que tous ces paramètres présentent des variations significatives par rapport au groupe témoin. Les rendements en fruits de tomate les plus élevés ont été constatés dans les traitements T3 et T2, atteignant respectivement 33,1 t.ha-1 et 31,7 t.ha-1. Une analyse approfondie a montré que ces deux rendements ne présentent aucune différence significative, suggérant ainsi que la réduction de moitié de la dose d'engrais chimique, en association avec l'utilisation des biofertilisants, permet de maintenir le rendement à un niveau élevé. Comparativement au traitement témoin, le traitement basé exclusivement sur les biofertilisants a engendré une augmentation de rendement de l'ordre de 45%. L'écart significatif de rendement enregistré entre les traitements témoins (T0) et les traitements basés sur les biofertilisants seuls (T1) témoigne de l'impact positif des biofertilisants à base de champignons appliqués.

Mots clés: tomate, biofertilisants, Champignons, productivité agricole

Téléchargements

Les données relatives au téléchargement ne sont pas encore disponibles.

INTRODUCTION

L’agriculture joue un rôle crucial dans l’économie et la sécurité alimentaire du Togo. Ce secteur soutient plus de 70 % de la population et a contribué à hauteur de 40% à la richesse nationale en 2015 (PNIASAN, 2017). L’impératif de répondre à une demande alimentaire constamment croissante constitue un enjeu majeur au sein des stratégies de développement. En vue d’atteindre des rendements agricoles élevés, le secteur agricole demeure fortement tributaire de l’usage d’amendements chimiques. Ces produits, bien qu’ils accroissent la teneur des sols en éléments nutritifs essentiels à la production des végétaux (Childers et al., 2011; Cordell et al., 2009; Gilbert, 2009), engendrent ultérieurement une dégradation et une perte des réserves en bases échangeables du sol, conjuguée à une acidification préjudiciable aux cultures (Pieri, 1986). En effet, bien que les engrais chimiques procurent des gains temporaires en termes de rendements des cultures, leurs effets néfastes sur l’environnement et la dégradation des ressources naturelles, notamment les sols, suscitent désormais des préoccupations majeures. À la lumière de plusieurs résultats de recherche, il a été démontré que l’emploi exclusif d’engrais minéraux ne garantit pas à long terme le maintien de la fertilité des sols (Ojetayo et al., 2011; Jones et al., 2013). Selon M’Sadak et al., (2015), après une période de trois à six années de culture ininterrompue, avec ou sans apport de fumure minérale, le sol devient acide accompagné d’une baisse du taux de matières organiques, lesquelles affectent directement le développement végétal. En conséquence, il apparaît donc nécessaire de rechercher et d’identifier des méthodes efficaces visant à accroître la productivité agricole et à garantir la sécurité alimentaire en prenant en compte les défis imposés par les approches conventionnelles de fertilisation.

L’agriculture moderne doit donc relever ce défi complexe de répondre à la demande croissante d’aliments tout en réduisant sa dépendance à l’égard des engrais chimiques. Cette transition vers une agriculture plus productive et moins tributaire des intrants chimiques doit être opérée de manière soutenable et respectueuse de l’environnement. Dans le cadre de cette recherche, la culture de la tomate a suscité beaucoup d’intérêt en raison de son rôle essentiel dans la subsistance humaine et de son statut prépondérant en tant qu’activité phare en culture maraîchère. Selon Goka et al., (2021), la culture de la tomate engage considérablement des acteurs parmi les groupes les plus vulnérables dans les régions du nord et au centre du Togo, en particulier les jeunes et les femmes. Du point de vue de la consommation, elle est reconnue comme un aliment jouant un rôle significatif dans la sécurité alimentaire et l’équilibre nutritionnel des populations, tout en contribuant de manière substantielle au développement socio-économique des ménages (FAO, 2021).

Pour répondre à ces défis, L’utilisation de méthodes innovantes de fertilisation basées sur l’emploi d’amendements organiques et des bio fertilisants à base de micro-organismes symbiotiques se positionne comme une alternative sérieuse aux pratiques conventionnelles. Ce travail vise à évaluer l’efficacité d’un complexe de bio fertilisants à base de champignons appliqué à la culture de la tomate à Sotouboua au centre du Togo. Il s’agira principalement d’examiner les avantages potentiels de cette fertilisation novatrice en termes d’amélioration de la productivité des cultures, plus particulièrement de la culture de la tomate. De façon spécifique, il s’agit de mesurer l’effet de ce complexe de bio fertilisants à base de champignons sur les paramètres agronomiques (le rendement en fruits, la croissance en taille et le nombre de fruits produits par plant) de tomate.

MATÉRIEL ET MÉTHODES 

Zone d’étude

L’étude a été réalisée sur le site de l’entreprise CECO Agro situé à Sotouboua (latitude : 8°33’50.41»N et longitude: 0°57'46.15"E) dans la région centrale (Togo). Il s’agit d’un site aménagé et irrigué d’une superficie estimé à environ 3,5 hectares dédié exclusivement à la production maraîchère (Figure 1). Selon la littérature consultée, les sols de Sotouboua quoiqu’ils présentent par endroit des caractères miniers sont satisfaisants pour l’exploitation agricole (Amouzou, 2000). Ce site jouit d’un climat de type tropical chaud et humide avec deux grandes saisons, l’une sèche et l’autre pluvieuse. Les pluies durent d’avril à octobre, avec un pic entre juillet et septembre. La saison sèche s’étend de novembre à mars avec l’harmattan qui s’installe en fin et début d’année.

Matériel végétal

Le matériel végétal utilisé est la variété de tomate Hybride Mongal F1 qui est une variété très productive et souvent utilisée en condition de champ au Togo. Elle a un potentiel de rendement de 30 tonnes à l’hectare.

Fertilisants utilisés

Deux types de fertilisants ont été employés au cours de cette étude, à savoir: (1) un ensemble de trois produits biologiques constituants le complexe de bio-fertilisants à base de champignons, et (2) des fertilisants chimiques, notamment le 15-15-15 et l’Urée 46 %.

En ce qui concerne le complexe de bio-fertilisants à base de champignons utilisé dans cette recherche, il s’agit de préparations biologiques d’origine locale, largement adoptées par les agriculteurs locaux. Ce complexe de bio-fertilisants inclut trois produits biologiques notamment: (1) un compost (nommé Mycosol), traité en association avec (2) une préparation de poudre de champignons (dénommée Mycotri). Cette dernière qui est une poudre biologique est élaborée à partir de spores issues de quatre types de champignons (Paecilomyces lilacinus, Trichoderma harzianum, Trichoderma viride et Pleurotus tuberregium) ainsi qu’une bactérie (Pseudomonas fluorescens). (3) Un engrais liquide foliaire (dénommé Mycoplus) élaboré à partir d’extrait de champignons, et qui joue un rôle de bio stimulant tout en fournissant à la plante certains éléments nutritifs comme le potassium.

Conduite de l’essai

L’expérimentation a été réalisée sur la période de juillet 2016 à décembre 2016. Le dispositif expérimental utilisé est un dispositif en bloc aléatoire complet avec quatre traitements et quatre répétitions:

T0: Témoin (aucune fertilisation)

T1: Traitement biofertilisants seuls (5 tonnes/ha de compost Mycosol + 1,5 Kg/ha de Mycotri + 4 litres/ha de Mycoplus)

T2: Traitement biofertilisants (5 tonnes/ha de compost Mycosol + 1,5 Kg/ha de Mycotri + 4 litres/ha de Mycoplus) + Engrais chimique à la demi-dose recommandée (100 Kg 15-15-15 + 50 Kg Urée 46%)

T3: Témoin positif, engrais chimique seul à la dose recommandée (200 Kg de 15-15-15 + 100 Kg Urée 46%)

La pépinière a été réalisée sur une surface de 4,5 m2 et conduite sur une période de 28 jours à la suite de laquelle les plants vigoureux ont été sélectionnés et repiqués sur les planches élémentaires de dimension: Longueur = 5,2 m x largeur = 1 m; soit une surface de 5,2 m² par planche. Un schéma cultural de 0,5 m x 0,8 m a été adopté avec au total 20 plants repiqués par planche.

Pour l’utilisation des bio-fertilisants, le compost (Mycosol) a été mélangé avec la préparation de poudre biologique à base de champignons (Mycotri) avant d’être enfoui dans le sol lors de la confection des planches. Deux semaines après le repiquage, le Mycoplus a été dilué dans de l’eau (80 ml de produit pour 16 litres d’eau) pour être pulvérisé sur les plants. Cette pulvérisation a été répétée 3 fois à la périodicité de deux semaines.

En ce qui concerne l’engrais chimique. Le NPK a été appliqué deux semaines après le repiquage des plants et l’Urée, un mois après le traitement du NPK.

Collecte et analyse des données

Les paramètres mesurés au cours de cette étude sont (1) la croissance en taille des plants, (2) le nombre de fruits produit par plant et (3) le rendement en fruit de la tomate.

Les données collectées ont été classées et analysées à l’aide du logiciel Genstat au seuil de significativité de 5%. La discrimination des moyennes a été faite à l’aide du test de Duncan également au seuil de 5%.

RÉSULTATS ET DISCUSSION 

Effet des traitements sur la croissance en taille des plants

Les données présentées sur la figure 2 exposent l’évolution en termes de hauteur moyenne des plants de tomate à différents stades de croissance (30ème, 45ème, 60ème et 90ème jour après le repiquage). D’une manière générale, les données enregistrées témoignent d›un accroissement constant de la hauteur des plants de tomate au cours de la période jusqu›au 90ème jour après le repiquage, tout en montrant des fluctuations entre les divers traitements appliqués. Les conclusions découlant de ces résultats révèlent que le traitement T3, caractérisé par l’application de la dose recommandée d’engrais chimique par hectare pour la culture de la tomate, a engendré les tailles des plants les plus élevées, affichant une hauteur moyenne du plant calculée à 103 cm. Subséquemment, le traitement T2, impliquant une combinaison des bio-fertilisants et une moitié dose préconisée d’engrais chimique, a enregistré une hauteur moyenne de 95 cm.

L’analyse de la variance des hauteurs moyennes relatives à ces deux traitements (T3 et T2) ne révèle aucune différence significative, ce qui établit que les hauteurs moyennes relevées sont similaires statistiquement au seuil de significativité de 5 %. En ce qui concerne les valeurs moyennes de hauteur enregistrées pour les groupes de traitements T0 (absence de fertilisation) et T1 (traité exclusivement avec des biofertilisants), au cours de la plage temporelle s’étendant du 30ème au 45ème jour après le repiquage, une différence significative dans le rythme de croissance des plants a été relevée avec des hauteurs moyennes des plants respectives de 23,9 cm et 28,3 cm au 45ème jour après le repiquage.

Cette disparité dans le rythme de croissance entre les plants témoins et ceux soumis à l’application de bio-fertilisants s’est graduellement réduite au fil du temps, pour devenir pratiquement indiscernable à partir du 60ème jour après le repiquage. En considérant les valeurs des tailles moyennes enregistrées au 90ème jour après le repiquage, il est à noter que les valeurs relevées pour ces deux traitements (T0 et T1) ont affiché les mesures les plus basses au sein de l’expérimentation en comparaison avec les traitements T2 et T3, se situant respectivement à 79 cm et 81 cm. La comparaison entre elles de ces deux moyennes de hauteur à un niveau de significativité de 5 % n’a révélé aucune différence significative, ce qui suggère que les tailles moyennes observées pour le groupe témoin et le groupe ayant reçu les bio-fertilisants présentent des caractéristiques statistiquement identiques sur le plan de la croissance en hauteur des plants de tomate.

Effet des traitements sur la production en nombre de fruits par plant

Les données présentées dans le tableau 1 ci-dessous illustrent les moyennes du nombre de fruits produits par plant pour les différents traitements appliqués (T0, T1, T2 et T3).

D’une façon générale, les données obtenues soulignent des disparités notables dans la production du nombre de fruits par plant liées aux divers traitements utilisés. Les résultats obtenus ont montré que le traitement témoin T0 (sans fertilisation) a généré une moyenne de 10 fruits par plant, la plus basse parmi tous les traitements appliqués. D’un point de vue statistique, les conclusions tirées de ces données démontrent que la disparité observée entre le traitement témoin (T0) et les autres traitements (T1, T2, T3) est significative, soulignant la nette infériorité du rendement en nombre de fruits dans le groupe de traitement témoin.

Pour le traitement T1 (traité avec les biofertilisants seuls), la moyenne calculée s’élève à 14 fruits par plant, surpassant ainsi celle du traitement témoin (T0) de 4 fruits en moyenne par plant. Ces données obtenues sous le traitement T1 montrent un gain moyen de 40% de rendement en nombre de fruits par plant lié à l’application des bio-fertilisants. Les traitements T2 (combinaison des bio-fertilisants à la moitié dose recommandée d’engrais chimique) et T3 (dose recommandée d’engrais chimique) ont affiché respectivement des moyennes de 19 et 20 fruits par plant.

En comparant les valeurs obtenues au niveau de ces deux traitements (T2 et T3), on constate qu’il n’existe aucune différence statistiquement significative, ce qui révèle une similarité dans les rendements en nombre de fruits par plant pour ces deux traitements. Les traitements T2 et T3 se démarquent avec des rendements en nombre de fruits les plus élevés.

Effet des traitements sur le rendement en fruit de la tomate

Les données présentées dans le tableau 2 ci-dessous illustrent les rendements en tonnes par hectare pour les différents traitements (T0, T1, T2 et T3). Ces résultats montrent que les rendements varient de manière significative entre les différents traitements en suivant la même logique que celle observée au niveau du rendement en nombre de fruits produits par plant. Plus spécifiquement, l’analyse des données de rendements révèle que les traitements T2 (combinaison des bio-fertilisants à la moitié dose recommandée d’engrais chimique) et T3 (dose recommandée d’engrais chimique) ont obtenu les rendements les plus élevés, avec respectivement 31,7 t.ha-1 et 33,1 t.ha-1.

Au plan statistique, la comparaison de ces valeurs n’a révélé aucune différence significative suggérant une similarité entre ces résultats au seuil de significativité de 5%. Dans la même logique que les valeurs obtenues au niveau du nombre de fruits produits par plant, le traitement témoin T0 (aucune fertilisation) a enregistré le plus faible rendement (14,5 t.ha-1) comparé aux autres traitements appliqués. Ce rendement obtenu dans le groupe témoin T0 comparé au rendement obtenu dans le groupe de traitement T1 (21,0 t.ha-1), qui ont été traités avec les biofertilisants seuls a révélé une différence significative traduisant ainsi une nette augmentation du rendement liée à l’application des bio-fertilisants. Du traitement T0 au traitement T1, le gain de rendement est ainsi estimé à 45 % montrant clairement un effet positif lié à l’utilisation du complexe de bio-fertilisants à base de champignons.

DISCUSSION 

Sur le paramètre de la croissance en hauteur des plants, les résultats obtenus dans cette étude ont révélé que l’utilisation de la dose d’engrais chimique recommandée par hectare a entraîné l’obtention des hauteurs de plant les plus élevées, en comparaison avec les autres traitements. Cette observation peut être interprétée par la disponibilité immédiate des éléments nutritifs apportés par les engrais chimiques appliqués, lesquels se sont avérés essentiels pour une croissance rapide des plants. Ces constatations corroborent les conclusions antérieures formulées par Efthimiadou et al. (2010) et Dutordoir (2006), qui ont affirmé que l’application d’engrais minéraux représente une source d’éléments nutritifs immédiatement assimilables par la plante, favorisant ainsi son alimentation. L’utilisation de bio-fertilisants combinés avec une demi-dose d’engrais chimique recommandée par hectare a également permis d’obtenir des hauteurs de plants élevées et comparables à celles observées avec des traitements exclusivement basés sur l’application de la dose recommandée par hectare d’engrais chimiques. Cela met en évidence les effets synergiques potentiels résultant de la combinaison des bio-fertilisants et des engrais chimiques. En effet, malgré la réduction de moitié de la dose recommandée par hectare d’engrais chimiques, les hauteurs significatives des plants obtenues sous ce traitement mettent en évidence l’effet positif des bio-fertilisants utilisés. Cette conclusion confirme de nombreux autres travaux qui ont démontré que lorsque les engrais minéraux sont associés aux matières organiques comme le compost (jouant un rôle amendant), l’assimilation des éléments nutritifs qu’ils apportent est encore plus favorisée (Akanza et al. 2016; Hien, 2004).

Pour avoir expérimenté cette pratique de fertilisation sur la culture de tomate, Nacro (2018) et Sawadogo et al. (2021) sont également parvenus à la même conclusion. En plus d’avoir favorisé l’assimilation des éléments nutritifs, certains auteurs soulignent le fait que les bio-fertilisants permettent également d'accroître l’efficacité d’absorption des nutriments et la croissance des plants au moyen des mécanismes tels que la solubilisation des nutriments et la production de substances favorisant la croissance rapide des plants (Desfontaines et al. 2018; Yakhin et al., 2017; Faessel et al., 2014; Sahraoui, 2013).

Cependant, l’absence de différence significative enregistrée entre les groupes de plants n’ayant reçu aucune fertilisation (traitement témoin) et ceux ayant reçus exclusivement l’application des bio-fertilisants (traitement T1) révèle ici que dans nos conditions d’expérimentation, l’application des bio-fertilisants seuls n’a pas été suffisante et assez efficace pour impacter significativement la croissance en hauteur des plants. Même si, entre le 30ème et 45ème jour après repiquage, on a observé un rythme différent de croissance des plants de ces deux groupes de traitement (T0 et T1), ce rythme n’a pu être maintenu au point où, la différence de croissance est devenue presque indiscernable à partir du 60ème jour après repiquage. En effet, la différence marginale en hauteur des plants entre le témoin (T0) et les traitements à bases de bio-fertilisants seuls (T1), s’expliquent par le fait que l’absence de fertilisation ou une dépendance exclusive aux bio-fertilisants (T1) peuvent entraîner une disponibilité sous-optimale des nutriments, ce qui entrave conséquemment la vitesse de croissance. Cette observation est cohérente avec les résultats de Kitabala et al., (2016) ainsi que Larbi (2006), qui mettent en avant le risque d’immobilisation de l’azote du sol par les micro-organismes lors de la décomposition de la matière organique, ce qui entrave la croissance végétale par manque d’azote nécessaire.

Ces résultats obtenus au niveau de la croissance en hauteur des plants, quoiqu’ils renforcent globalement les connaissances déjà établies en matière de fertilisation sur la croissance des plants de tomate, ne concordent pas avec les conclusions d’autres chercheurs, notamment Sawadogo et al. (2021), qui ont constaté que les traitements à base des bio-fertilisants, combinés à des engrais chimiques (NPK + Urée), engendraient des résultats supérieurs par rapport aux traitements reposant sur l’utilisation d’engrais chimiques (NPK + Urée). Cette divergence de résultats peut être attribuée en partie à la variation des caractéristiques des sols utilisés dans les expérimentations, d’une part, et aux différences dans les quantités d’engrais appliquées, d’autre part. Plus précisément, il est à noter que les auteurs précités (Sawadogo et al., 2021) ont administré des doses plus élevées, à savoir 30 t.ha-1 de compost et 200 Kg d’engrais chimique (NPK + Urée), des quantités supérieures à celles employées dans cette étude ce qui expliquerait cette différence de résultat.

En ce qui concerne les résultats relatifs au nombre de fruits produits par plant et le rendement en fruits de la tomate, les divergences observées entre les traitements T0, T1, T2 et T3 corroborent l’importance de la fertilité du sol et de la disponibilité des éléments nutritifs dans le processus de production de fruits de tomate. La nette disparité entre le traitement témoin (T0) et les autres traitements met en lumière le rôle crucial de l’approvisionnement en éléments nutritifs dans la production de fruits (Gravel et al., 2007).

Le rendement en fruits obtenu avec le traitement T1 (biofertilisants seuls) s’élève à 21,04 t.ha-1, dépassant légèrement la plage de rendements moyens (5 à 20 t.ha-1) décrite par De Lannoy (2011) pour les régions tropicales. Ceci atteste de l’effet significatif des bio-fertilisants utilisés. En effet, le groupe de plants traités exclusivement avec les bio-fertilisants s’est distingué du groupe témoin (sans fertilisation), en enregistrant une augmentation de rendement de 40 % et 45 % respectivement pour le nombre de fruits produits par plant et le rendement en fruits de tomate. Cette amélioration substantielle des rendements peut s’expliquer par la richesse en éléments nutritifs essentiels à la production de fruits présents dans les amendements biologiques utilisés, ainsi que par l’action potentielle des micro-organismes, notamment les champignons mycorhizien, qui auraient joué un rôle significatif.

Selon Candido et al., (2013), l’utilisation des champignons mycorhizien permet une augmentation significative en nombre de fruits par rapport aux plants non inoculés. Ces résultats obtenus sont en accord avec les conclusions de Roy-Fortin et al. (2014), qui ont démontré que les rendements de tomates peuvent varier entre 16 et 30 t.ha-1 en fonction des traitements appliqués et de la variété. L’application des bio-fertilisants en combinaison avec la moitié dose d’engrais chimiques recommandée par hectare pour la culture de tomate a considérablement augmenté le rendement, le portant à 31,75 t.ha-1, représentant des gains de rendement de 119% et 50,9 % respectivement par rapport au traitement témoin T0 (sans fertilisation) et au traitement T1 (traité exclusivement avec des bio-fertilisants). Ces résultats corroborent les conclusions de Ziane, (2018), qui avait également enregistré des hausses de rendements significatives après avoir combiné de l’engrais NPK à des inoculations à bases de champignons mycorhizien. Xavier et Germida (1997) ont eux aussi noté une augmentation de 20% dans le rendement en grains du blé lié à l’effet de l’inoculation par les champignons mycorhizien associés à une application de 20 Kg.ha-1 d’engrais phosphatés.

L’absence de différence significative entre les résultats obtenus pour les plants ayant reçu la totalité de la dose recommandée d’engrais chimique par hectare et ceux ayant reçu la moitié de cette dose, combinée à l’application des bio-fertilisants, démontre de manière explicite que la réduction de moitié de la quantité d’engrais en association avec l’utilisation des bio-fertilisants, peut maintenir le rendement. En nous appuyant sur les effets bénéfiques immédiats et durables des amendements organiques sur l’amélioration de la fertilité du sol, comme établi par les recherches menées par Ouahmed (2016), Sikuzani et al. (2014), Jemai et al. (2011) et Annabi et al. (2011), il est manifeste que cette pratique, qui permet de maintenir le rendement tout en réduisant significativement l'apport d'engrais chimiques, devrait être fortement préconisée.

CONCLUSION 

L’amélioration de la productivité agricole corrélée d’une diminution significative de l’utilisation des engrais chimiques est un défi majeur pour l’agriculture moderne. L’objectif de cette étude était d’évaluer l’efficacité d’un complexe de bio-fertilisants à base de champignons largement utilisé par les agriculteurs locaux dans la culture de la tomate. Les résultats obtenus ont montré que l’utilisation exclusive de ces bio-fertilisants a conduit à une augmentation significative du rendement en fruits de tomate, avec une amélioration de l’ordre de 45 % par rapport aux cultures non fertilisées.

Lorsque ces bio-fertilisants ont été associés à 50% de la dose recommandée d’engrais chimique par hectare pour la tomate, les gains de rendement ont été encore plus marqués, atteignant jusqu’à 119 % par rapport aux cultures non fertilisées. Cette approche témoigne d’une utilisation efficace et efficiente des engrais appliqués, démontrant ainsi le potentiel de combinaison des bio-fertilisants avec des engrais chimiques. Au-delà de l’amélioration du rendement, l’utilisation de ces bio-fertilisants impliquant des amendements organiques tels que le compost contribuerait de manière significative à la restauration et au maintien de la fertilité des sols. De plus, cette pratique favorise le développement des micro-organismes bénéfiques du sol, ce qui aurait des effets positifs à long terme sur la santé du sol et la durabilité de la production agricole. Pour une préservation de l’environnement et de la fertilité des sols, l’usage de cette pratique devrait être encouragé.

RÉFÉRENCES

Akanza, K.P., Sanogo, S., N’Da, H.A. (2016). Influence combinée des fumures organique et minérale sur la nutrition et le rendement du maïs: impact sur le diagnostic des carences du sol. Tropicultura, 34: 208-220.

Amouzou, T.C. (2000). Dossier d’Identification et de mise en place de l’Ong Cecodri, Gembloux, 39p.

Annabi, M., Raclot, D., Bahri, H., Bailly, J.S., Gomez, C., Le Bissonnais, Y. (2017). Spacial variability of soil aggregate stability at the scale of an agricultural region in Tunisia. Catena, Soil Science – Hydrology Geomorphonogy, 153: 157-167.

Candido, V., Campanelli, G., D’Addabbo, T., Castronuovo, D., Renco, M., Camele, I. (2013). Growth and yield promoting effect of artificial mycorrhization combined with different fertiliser rates on field-grown tomato. Italian Journal of Agronomy, 8: e22.

Childers, D.L., Corman, J., Edwards, M., Elser J.J. (2011). Suistanability challenges of phosphorus and food: solutions from closing the human phosphorus cycle. BioSciences, 61: 117 – 124.

Cordell, D., Drangert, J.-O., White, S. (2009). The story of phosphorus: Global food security and food for though. Global Environnement Change, 19: 292 -305.

De Lannoy, G. (2001). Légumes fruits in agriculture en Afrique tropicale, Direction générale de la coopération internationale, Ministère des Affaires Étrangères, du Commerce Extérieur et de la Coopération Internationale, Bruxelles-Belgique, 503-551.

Desfontaines, L., Rotin, P., Ozier-Lafontaine, H. (2018). Les Biostimulants: Qu’en savons-nous ? Quelles alternatives pour l’agriculture Guyanaise ? Innovations Agronomiques, 64: 31- 46.

Dutordoir, C.D. (2006). Impact de pratiques de gestion de la fertilité sur les rendements en mil dans le Fakara (Niger). Mémoire de Bio-ingénieur, Faculté d’ingénierie biologique, agronomique et environnementale, Université Catholique de Louvain, p. 33-140.

Eftimladou, A., Bilalis, D., Karkanis, A., Froud-Williams, B. (2010). Combined organic/inorganic fertilization enhance soil quality and increased yield, photosynthesis and sustainability of sweet maize crop. Aust. J. Crop Sci., 4: 722-729.

Goka, M.G., Mensah, R.T., Dufrechou, M., Picouet, P., Karou, S. D., Ameyapoh, Y.A. (2021). Importance socio-économique de la production et propriétés nutritionnelles de la tomate (Solanum lycopersicon L.) au Togo: synthèse bibliographique. Journal de Recherche Scientifique de l’Université de Lomé (Togo), 23: 89-104.

Gravel, V., Antoun, H., Tweddell, R.J. (2007). Growth stimulation and fruit yield improvement of greenhouse tomato plants by inoculation with Pseudomonas putida or Trichoderma atroviride: Possible role of indole acetic acid (IAA). Soil Biology and Biochemistry, 39: 1968–1977.

Faessel, L., Gomy, C., Nassr, N., Tostivint, C., Hipper, C., Dechanteloup, A. (2014). Produits de stimulation en agriculture visant à améliorer les fonctionnalités biologiques des sols et des plantes. Étude des connaissances disponibles et recommandations stratégiques, rapport d’étude au ministère de l’Agriculture, de l'Agro-alimentaire et de la Forê, 148 p.

FAO (2021). Plan de Développement de la filière tomate au Togo 2021-2030, version finale, 61p.

Gilbert, N., (2009). The disappearing nutriment. Nature, 461: 716-718.

Hien, E. (2004). Dynamique du carbone dans un acrisol ferrique du Centre-Ouest Burkina: Influence des pratiques culturales sur le stock et la qualité de la matière organique. Thèse de doctorat en Sciences des Sol, École Nationale Supérieure Agronomique de Montpellier, France,138 p.

Jemai, I., Guirat, S.B., Aissa, N.B., Jedidi, N., Gallali, T. (2011). Effet de l’amendement par fumier de ferme et par compost d’ordures ménagères sur la restauration d’un sol argileux de plaine sous climat semi-aride tunisien. Étude et gestion des sols, 18: 271–285.

Jones, D.L., Clode, P.L., Kilburn, M.R., Stockdale, E.A., Murphy, D.V. (2013). Competition between plant and bacterial cells at the microsale regulates the dynamics of nitrogen acquisition in wheat (Triticum aestivum). New Phytologist, 200 : 796 – 807.

M’Sadak, Y., M,Barek, K. A. (2015). Évaluation de la maturité et de la qualité chimique des substrats de croissance à base de methacompost avicole pour une meilleure exploitation. LARHYSS, 23: 117 -138.

Nacro, S.R. (2018). Effets des fertilisants organiques sur la production de la tomate et les paramètres chimiques du sol au Centre Nord du Burkina Faso. Mémoire de Fin de cycle option Agronomie, Institut de Développement Rural (IDR), Université Nazi Boni/IDR, 56 pages.

Ojetayo, A., Olaniyi, J., Akanbi, W., Olabiyi, T. (2011). Effects of fertilizer types on nutritionnal quality of two cabbage varieties before and after storage. Journal of Applied Biosciences, 48: 33222-3330.

Ouahmed, M.A.M. (2016). Effet des amendements organiques sur la structure des sols et sa fertilité physico-chimique: Cas des sols de la région de Chtouka (Sous Massa, Maroc). Mémoire de fin d'études, Master Sciences et Techniques, Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Faculté des Sciences et Techniques, Fès, Maroc.

Pieri, C. (1986). Fertilisation des cultures vivrières et fertilité des sols en agriculture paysanne subsaharienne. Agronomie Tropicale, 41:1 - 20.

Programme national d’investissement agricole, de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PNIASAN) - Plan d’investissement 2017-2025.

Roy-Fortin, V., Weill, A., Duval, J. (2014). Optimisation de la fertilisation et essais de variétés pour la production de tomates en grands tunnels. CETAB,8p.

Sahraoui, A.L.-H. (2013). La Mycorhize a arbuscules: quels bénéfices pour I'homme et son environnement dans son contexte de développement durable ? Revue Sciences Technologies, Synthèse, 26: 06 -19.

Sawadogo, J., Coulibaly, P.J., Traore, B., Bassole, M.S.D., Savadogo, C.A., Legma, J.B. (2021). Effets des fertilisants biologiques sur la productivité de la tomate en zone semi-aride du Burkina Faso. Journal of Applied Biosciences, 167: 17375 – 17390.

Sikuzani, Y.U., Ilunga, G.M., Mulembo, T.M., Katombe, B.N., Lwalaba, J.L.W., Lukangila, M.A., Longanza, L.B. (2014). Amélioration de la qualité des sols acides de Lubumbashi (Katanga, RD Congo) par l’application de différents niveaux de compost de fumiers de poules. Journal of Applied Biosciences, 77: 6523-6533‑6533.

Xavier, L.J.C., Germida, J.J. (1997). Growth response of lentil and wheat to Glomus clarum NT4 over a range of P levels in a Saskatchewan soil containing indigenous AM fungi. Mycorrhiza, 7: 3–8.

Yakhin, O.I., Lubyanov, A.A., Yakhin, I. A., Brown, P.H. (2017). Biostimulants in Plant Science: A global perspective. Frontiers in Plant Science, 7: 1-32.

Ziane, H. (2018). Application des champignons mycorhiziens à arbuscules dans la culture de la tomate industrielle. Thèse de doctorat en biologie végétale et environnement, biodiversité et gestion des écosystèmes, Université Badji Mokhtar-Annaba.

Téléchargements

Publié-e

15-12-2023

Numéro

Rubrique

Production Végétale et Environnement

Articles similaires

<< < 14 15 16 17 

Vous pouvez également Lancer une recherche avancée d’articles similaires à cet article.