Prospection des maladies microbiennes de l’olivier dans la région Tadla-Azilal

Auteurs-es

  • Abouddihaj BARGUIGUA Laboratoire of Biotechnologies et Développement Durable des Ressources Naturelles, Département de Biologie. Faculté Polydisciplinaire Béni Mellal. Université Sultan Moulay Slimane. Mghila, Béni Mellal, Maroc
  • Ilham ZAHIR Faculté polydisciplinaire de Béni Mellal, Université Sultan Moulay Slimane, Maroc
  • Saadia YOUSS Laboratoire of Biotechnologies et Développement Durable des Ressources Naturelles, Département de Biologie. Faculté Polydisciplinaire Béni Mellal. Université Sultan Moulay Slimane. Mghila, Béni Mellal, 23030, Maroc
  • Nadia FIKRI Laboratoire of Biotechnologies et Développement Durable des Ressources Naturelles, Département de Biologie. Faculté Polydisciplinaire Béni Mellal. Université Sultan Moulay Slimane. Mghila, Béni Mellal, 23030, Maroc
  • Bochra YOUSS Laboratoire of Biotechnologies et Développement Durable des Ressources Naturelles, Département de Biologie. Faculté Polydisciplinaire Béni Mellal. Université Sultan Moulay Slimane. Mghila, Béni Mellal, 23030, Maroc

Résumé

La présente étude vise à localiser d’éventuels foyers d'infections d’origines fongiques et bactériennes de l’olivier au niveau de la région de Tadla-Azilal et d’en estimer les taux d’infestation sur la base d’un diagnostic symptomatologique. Les prospections effectuées, dans 11 communes et villages (Février-Avril 2017), nous ont permis de recenser la présence de trois maladies d’origine microbienne dont deux d’origine fongique à savoir la verticilliose et la tavelure (l’œil de paon) et une d’origine bactérienne, la tuberculose de l’olivier. L’importance de la tavelure dans la région est 91,3 %. Les vergers de Béni Mellal, Tagzirt, Mghila et Sidi Jabber sont les plus touchés par cette maladie. Quand à la verticilliose, une des maladies les plus graves de l'olivier, elle représente 65,2% dans la région, notamment au niveau des vergers de Fquih Ben Salah (75%) qui sont les plus atteints suivis de Béni Mellal et Azilal avec 66,7% et 55,6%, respectivement. L’importance de la bactériose dans les oliveraies est de 13,0%. Sur 6 douars et communes de la région de Béni Mellal visités, 2 (soit 33,3%) sont atteints de la maladie. Dans la région d’Azilal, aucun signe de cette maladie n’est rencontré. L’évaluation des connaissances de 103 agriculteurs de la région vis-à-vis des phytopathologies et les méthodes de lutte révèle que 82,8% ont des connaissances sur la présence des ravageurs et maladies microbiennes, dont l’œil de paon, le psylle, la verticilliose sont les plus mentionnés. Néanmoins, seulement 48,5% de ces agriculteurs déclarent l’adoption d’un traitement phytosanitaire contre ces phytopathologies.

Mots clés: Maladies d’oliviers, champignons, bactéries, région Tadla-Azilal

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Introduction 

L’olivier (Olea europaea L.) représente la principale espèce fruitière au Maroc où il occupe des superficies de plus de 50% de la superficie arboricole nationale soit 6% de la superficie du bassin méditerranéen (Sedra, 2002 ; Ater et al., 2016). Actuellement, le Maroc est le deuxième producteur mondial d’olive de conserve et le sixième producteur mondial d'huile d'olive derrière l'Union européenne, la Tunisie et la Turquie (El Mouhtadi et al., 2014 ; El Qarnifa et al., 2019). Dans la région Tadla-Azilal, l’olivier constitue le patrimoine régional d’excellence de l’agriculture en occupant une superficie estimée à 65 500 ha représentant 12% en oléiculture nationale et 60% d’essences fruitières au niveau de cette région (Daouani, 2014 : Taïbi et al., 2015).

Bien que le Maroc possède une diversité génétique substantielle parmi ses variétés d’oliviers, il se distingue des autres pays oléicoles par la dominance d’une seule variété dénommée « picholine marocaine » à double usage : huile d’olive et olives de table. Localement, cette variété est appelée également «Zeitoun Beldi» et couvre 90% du total des vergers d'oliviers marocains (APP, 2010 ; El Mouhtadi et al., 2014 ; Mansouri et al., 2015 ; El Qarnifa et al., 2019). Son importance se justifie par la qualité de ses produits et leurs utilisations séculaires ainsi que ses fonctions multiples de lutte contre l’érosion, de valorisation des terres agricoles et de fixation des populations dans les zones de montagne (APP, 2010). Malgré sa bonne adaptation, elle a un rendement oléique moyen du 18 % et elle présente un fort indice d’alternance de production ainsi qu’une forte sensibilité à certaines maladies et ravageurs (Mouhtadi et al., 2014).

En fait, les différentes études réalisées à l’échelle nationale ont révélé que l'olivier et ses produits peuvent être endommagés par la présence de nombreux insectes ravageurs (Zouiten et El Hadrami, 2001 ; Chliyeh et al., 2014 ; Meftah et al., 2014). Ce problème phytosanitaire de l'olivier constitue le principal obstacle à la productivité de l'oléiculture. Parmi les principaux ravageurs d’olivier marocain, les plus nuisibles sont la teigne de l'olivier (Prays oleae) ; la mouche de l'olivier (Bactrocera olea); le psylle de l'olivier (Euphyllura olivina) et la cochenille noire (Saissetia oleae) (Zouiten et El Hadrami, 2001 ; APP, 2010; COI, 2007 ; Chliyeh et al., 2014).

En plus de ces ravageurs, les microorganismes sont aussi impliqués dans l’atteinte d’oliviers marocains. Les principaux champignons identifiés sont : Fusicladium oleagineum responsable de l’œil de paon (Rongai et al., 2012), Verticillium dahliae l’agent causal de la verticillose (COI, 2007), Fumago salicina et Capnodium oleaginum impliqués dans l’apparition de la fumagine (APP, 2010). Alors que parmi les bactéries impliquées, Pseudomonas savastanoi pv savastanoi a été identifiée comme responsable de la tuberculose de l’olivier caractérisée par la présence des tubercules sur les branches et les tiges (APP, 2010 ; Chliyeh et al., 2014).

Les symptômes de ces maladies sont divers et peuvent toucher tous les organes de l'olivier (rameaux, feuilles, fleurs, et fruits) dont les dégâts peuvent allez de la chute prématurée des feuilles jusqu’à la diminution de la quantité et la qualité d'huile pouvant provoquer ainsi des dégâts économiquement importants en l'absence de toute intervention sanitaire (APP, 2010; COI, 2007 ; Zouiten et El Hadrami, 2001).

Dans ce contexte, le présent travail est la première étude qui consiste à localiser d’éventuels foyers des infections d’origines fongiques et bactériennes au niveau de quelques oliveraies prospectées dans la région de Tadla-Azilal et d’en estimer les taux d’infestation sur la base d’un diagnostic symptomatologique. L’investigation a également pour objectif d’évaluer le degré de connaissance des agriculteurs sur la présence de ravageurs et maladies microbiennes dans la région d’étude ainsi que déterminer si les méthodes de lutte sont adoptées.

Matériel et méthodes

Présentation de la région étudiée : Tadla-Azillal

La région Tadla-Azilal était l'une des seize régions du Maroc avant le découpage territorial de 2015. Elle a été intégrée avec les provinces de Khénifra et de Khouribga dans la nouvelle région de Béni Mellal-Khénifra.

Elle est située au centre du pays sur une superficie de 17125 km2 De sa situation entre deux plateaux de phosphate et le moyen Atlas, la région de Tadla Azilal d’une altitude moyenne de 400 à 700 m se caractérise par un climat très continental, et la quantité de précipitations varie entre 300 et 750 mm selon les années (El Azzouzi et Zidane, 2015). Cette région regroupe trois provinces qui sont Béni Mellal, Azilal et Fquih Ben Salah. L’agriculture représente l’activité dominante au niveau de la région, aussi bien par les emplois offerts (81% de la population active occupée rurale en 2008) que par les effets induits sur l’économie régionale. D’autant plus que la région, avec ses plaines (Tadla) et ses importantes ressources en eau, offre la possibilité de développement d’une agriculture moderne et industrialisant (Direction Régionale du Haut-commissariat au Plan, 2010). En ce qui concerne les plantations exercées dans la région, les cultures fruitières sont constituées essentiellement par des vergers d’oliviers (Taïbi et al., 2015). Effectivement, ce patrimoine couvre une superficie de 65 500 hectares dans la région (Daouani, 2014) dont les olives représentent environ 12% de la production nationale parmi les fruitiers (Taïbi et al., 2015).

En outre, l’activité d’oléiculture joue un rôle incontestable sur le plan socio-économique par la création de 2 millions de journées de travail annuellement dont 6500 emplois permanents (Daouani, 2014).

De plus, le secteur de l’huile d’olive est caractérisé par un développement lié à l’augmentation de la demande (Taïbi et al., 2015).. En fait, la production réalisée en 2016-2017 est de l’ordre de 150000 tonnes. Cette production est assurée par une superficie oléicole irriguée qui représente 80% avec 5000 Ha conduite en irrigation à économie d’eau (goutte à goutte) et 1000 Ha en super intensive (Daouani, 2014).

Prospection et identification des maladies d’origine microbienne

Selon les stations oléicoles de la région étudiée et la répartition géographique provinciale, nous avons réparti cette région en trois zones (Figure 1):

• Zone 1 : Fquih Ben Salah

• Zone 2 : Azilal

• Zone 3 : Béni Mellal

Les prospections sur terrain ont été réalisées, graduellement, depuis le mois de Février jusqu’à Avril 2017. Elles consistent à choisir au hasard plusieurs exploitations oléicoles réparties au niveau de la région. Ainsi 11 communes et villages ayant une activité oléicole importante, ont été choisis et répartis comme le suivant :

• Zone 1 : Bradia, Oulad Youssef, Oulad said, Fquih Ben Salah

• Zone 2: Afourar, Béni Ayat

• Zone 3: Mghila, Tagzirt, Sidi Jaber, Tadla, Fryata

Figure 1:

Par ailleurs, dans la prospection des vergers d’oléicultures nous avons effectué des parcours en suivant un modèle diagonal dont les déplacements dans le verger sont en zigzags selon le protocole adopté par Dieudonné (1989) (Figure 2). Cette méthode vise à couvrir la plus grande superficie du champ et d'inspecter le plus grand nombre d’arbre d’olivier tout en réduisant les probabilités d'omettre un foyer d'infestation.

Les observations et les notations de terrain sont basées sur un diagnostic symptomatologique, indicateur de la présence de la maladie, en utilisant des guides fournies par l’Institut National de la Recherche Agronomique.

Figure 2:

Etat de connaissance des agriculteurs aux ravageurs et maladies microbiennes

Afin d’assurer une bonne couverture spatiale des zones étudiées, nous avons adopté un questionnaire qui cible les agriculteurs pratiquant l’oléiculture pour:

• Estimer l’état de connaissance de ces agriculteurs aux ravageurs et maladies microbiennes

• Déterminer si les moyens de lutte sont pratiqués contre ces phytopathologies.

Résultats et discussion

Prospection et identification des maladies d’origine microbienne

Les prospections effectuées dans les trois zones d’oléiculture désignées, nous ont permis de recenser la présence de trois maladies d’origine microbienne dont deux d’origine fongique à savoir la verticilliose, et la tavelure et une d’origine bactérienne, la tuberculose de l’olivier.

Tavelure de l’olivier

Importance de la maladie

La tavelure de l’olive, appelée encore l’œil de Paon, est causée par Fusicladium oleagineum, un agent pathogène spécifique au développement sous-cutané se traduisant par des lésions circulaires sur les feuilles de l’olivier (Viruega et al., 2011 ; Rongai et al., 2012).

L’importance de cette maladie vasculaire est de l’ordre de 91,30% dans les oliveraies des trois zones. On constate également que Béni Mellal est la région la plus touchée par la maladie (tableau 1).

Tableau 1:

L’œil de Paon est considéré comme l’une des plus maladies foliaires de l’olivier répandues dans de nombreuses régions oléicoles en entrainant des pertes de rendement estimées à 20% (Viruega et al., 2011 ; Rongai et al., 2012). Incontestablement, la maladie est particulièrement grave dans les pépinières et les vergers où les cultivars d’olivier sont fortement plantés lorsque les conditions environnementales sont favorables de température et d’humidité au développement du champignon (Viruega et al., 2011 ).

Au Maroc, cette maladie fait partie également des maladies les plus importantes de l'olivier (Rhimini et al., 2014). Elle est apparue dans plusieurs régions à savoir Gharb, Ouazzane (Rhimini et al., 2014), Béni Mellal, Marrakech (Besri et Outassout, 1984) et Kelaa Sraghna (Tajnari, 1999).

Symptômes de la maladie au champ

Les prospections effectuées dans les oliveraies des trois zones qu’on a visitées ont permis d’observer essentiellement sur la face supérieure des feuilles des taches circulaires zonées entourées de halos jaunes, d’où le terme « œil de paon». Ces taches ont une couleur qui varie du gris au brunâtre ou marron foncé allant jusqu'au jaune-orangé. Ces symptômes observés dans les oliveraies sont caractéristiques de la tavelure de l’olivier.

Effectivement, quand les conditions de température et d’humidité sont bénéfiques à la germination des conidies au champignon F. oleagineum, celui ci pénètre à travers la cuticule de la face supérieure des feuilles, développant un mycélium qui se propage dans les tissus internes de la feuille (Belaj et al., 2010) provoquant ainsi des lésions typiques qui sont souvent entourées de halos jaunes (Viruega et al., 2011). Lorsque l’attaque est sévère une nécrose atteint les nervures principales, les feuilles jaunissent entrainant ainsi leur abscission prématurée (Rongai et al., 2012). En outre, les infections récurrentes provoquent le dépérissement des branches, la faiblesse des oliviers et la diminution parfois importante de la production à cause d’une capacité faible de photosynthèse ainsi qu’une pousse végétative limitée (Viruega et al., 2011 ; Couanon et al., 2018). La maladie peut également apparaître sur les fruits, les pédoncules des fruits et les jeunes pousses menant à l’affaiblissement de la plante entière (Viruega et al., 2011 ; Rongai et al., 2012 ).

Verticilliose de l’olivier

Importance de la maladie

La verticilliose est causée par un champignon microscopique présent dans le sol, Verticillium dahliae, qui affecte d'abord les racines puis le système vasculaire de l'arbre, et cause des dommages dans les parties aériennes (COI, 2007).

L’importance de cette maladie vasculaire est de l’ordre de 65,21% dans les oliveraies. D’une façon générale et dans la limite des communes et douars visités de la région d’étude, la maladie s’est révélée bien répartie et installée. En effet, dans la région de Fquih Ben Salah, 75% (n=6) de champs d’oliviers prospectés renferment des foyers de la maladie suivie de la région de Béni Mellal et d’Azilal avec 66,67% et 55,56%, respectivement (tableau 2).

Tableau 2:

Au Maroc, la maladie a été décrite pour la première fois dans la région de Meknès sur des oliveraies jeunes et bien entretenues où elle a occasionné des dégâts importants. Cette même année, plus de 40 isolats ont été récoltés lors de différentes prospections effectuées dans la même région avec une importance d’attaque allant de 3,72% à 30,35% en moyenne. Après, la maladie a été détectée dans plusieurs régions éloignées des centres de culture de l’olivier par exemple à Figuig, Béni-Mellal, et El Kelaâa des Sraghna. Par ailleurs, dans certaines localités de la région du Haouz, cette trachéomycose s’est révélée bien répartie et installée avec un pourcentage de contamination de 40,9% de douars, 61,9% de coopératives et 3,9% de 2823 exploitations agricoles visitées et une incidence qui varie de 1 à 50% d’arbres atteints en fonction des vergers oléicoles (Sedra, 2002).

Symptômes de la maladie au champ

Les prospections effectuées dans l’oliveraie de la région ont permis d’observer des flétrissements. Ainsi, nous avons remarqué la défoliation de l’extrémité des branches qui gardent, toutefois, quelques feuilles desséchées à leur base. Nous avons observé également la présence des jeunes pousses totalement défeuillées et d'autres presque sèches, mais qui peuvent conserver parfois quelques feuilles de couleur brune à leur extrémité.

Au niveau d’autres oliviers, nous avons constaté sur les jeunes rameaux la présence de feuilles ayant une couleur brun clair, enroulées dans le sens de la longueur, desséchées et cassantes. Parfois ces feuilles sont très fragiles et chutent au moindre contact.

Des symptômes similaires de verticilliose de l’olivier ont été observés d’après l’étude menée par Sedra (2002) en effectuant des prospections dans 2823 exploitations dans la zone du Haouz au Maroc.

Incontestablement, quand les conditions de température et d’humidité sont favorables, les sclérotes, une forme de conservation du champignon, produisent des spores qui germent et pénètrent dans le système racinaire et à la base du tronc (Sedra, 2002 ; Association Française Interprofessionnelle de l'Olive, 2017). L’infestation du champignon est favorisée par la présence de blessures (Association Française Interprofessionnelle de l'Olive, 2017). Le mycélium se développe dans les tissus du xylème, qui transportent la sève brute vers les feuilles (Sedra, 2002). Ainsi, une fois tout le xylème est colonisé, la sève devient bloquée (Association Française Interprofessionnelle de l'Olive, 2017). Les feuilles des organes foliacés tels que les rameaux et les branches perdent leur coloration verdâtre pour virer au brun clair, ce qui induit leur desséchement notamment chez les jeunes d’arbres d’oliviers. Par ailleurs sur d’autres d’arbres d’olivier, les feuilles desséchées deviennent cassantes ayant tendances à chuter (Boutkhil, 2012).

Tuberculose de l’olivier

Importance de la maladie

La tuberculose d’olivier est la principale maladie bactérienne de l’olivier causée par Pseudomonas savastanoi (COI, 2007 ; Benjama, 2003). Cette bactérie s’installe sur les blessures et provoque des tumeurs aériennes sur différentes parties du végétal (Benjama, 2003).

L’importance de cette bactériose dans les oliveraies est aux alentours de 13,04%. Sur 6 douars et communes de la région de Béni Mellal visitées, 2 (soit 33,34%) sont atteintes de la maladie (Tableau 3). Dans la région d’Azillal, aucun signe de maladie n’est rencontré.

Tableau 3:

La tuberculose de l’olivier est répandue dans tout le bassin méditerranéen et la Californie (Benjama, 2003). Au Maroc, cette phytopathologie est considérée comme la principale maladie bactérienne de l'olivier (Bouaichi et al., 2019 a). En fait, elle a été signalée pour la première fois dans la région de Meknès en 1960. Dés lors, elle s'est étendue depuis dans toutes les aires d’oléiculture du pays à savoir Béni Mellal, El Kalaa, Marrakech, Kenitra, Sidi Kacem, Oujda, Hoceima, Taza, Fès, Taounat et Ouazzane (Benjama, 1990 : Benjama, 2003 ; Bouaichi, 2015).

Par ailleurs, des prospections sur le terrain ont été menées en 2012-2013 dans plusieurs régions marocaines révèlent que l’incidence de la maladie est variable d’une région à l’autre et même d’une commune à l’autre allant de 1% jusqu’à 100%. Cependant, la progression de la maladie dans les régions du centre et du nord du pays est favorisée par les conditions climatiques telles que l’humidité et la température (Bouaichi, 2015).

Symptômes de la maladie au champ

Les prospections effectuées dans l’oliveraie de Tagzirt et Bradia a permis d’observer des excroissances tumorales de bois, de 2 à 10 cm de diamètre, survenant sur les jeunes rameaux, les branches et les tiges de l’arbre. Ces symptômes témoignent que les oliviers de ces régions sont touchés par la tuberculose ou le chancre bactérien de l’olivier.

Effectivement, la maladie se manifeste par des tumeurs parenchymateuses à forme irrégulière de couleur vertes au début et à surface lisses. Le nœud d’olive apparait comme galle bruts sur les rameaux, branches troncs principal, racines, feuilles abimées, tiges, fruits et les jeunes pousses (Benjama, 1990). Après quelques mois les excroissances hyperplasiques acquièrent un aspect spongieux et irrégulier, devenant dur et brun sur les petites pousses (Benjama, 1990 ; Bouaichi et al., 2019 b).

Il semble que l’intensité des dégâts provoqués par la tuberculose d’olivier est fortement liée au nombre de tumeurs par arbre. En fait, au fur et à mesure que le nombre de tumeurs augmente, la croissance du rameau est retardée et le nombre de grappes fruitières se trouve affecté (Benjama, 2003). En outre, la maladie présente un problème important pour les cultures oléicoles en raison de son effet sur la croissance végétative (déclin des branches et des repousses, mort des petites branches et des rameaux), le rendement en olives, et même éventuellement sur la qualité de l'huile d'olive vu de caractéristiques organoleptiques inférieures telles qu'une odeur désagréable ainsi qu’un goût amer et rance (Bouaichi et al., 2019 a).

Par ailleurs, l’infection du végétal par P. savastanoi nécessite la présence des ouvertures fournies par des cicatrices foliaires, des plaies de taille, des fissures dues au gel et grêle ou des opérations de récolte (Benjama, 1990 ; Bouaichi et al., 2019 b). Les points d’abscission des feuilles, des fleurs et des fruits sont aussi des portes d’entrée pour la bactérie (Benjama, 1990).

Les tumeurs se développent en réaction aux phytohormones produites par la bactérie; y compris l'acide indole-3-acétique (IAA) et les cytokinines (Penyalver et al., 2000 ; Bouaichi et al., 2015). Ce pouvoir pathogène est induit par un plasmide « Ti » (tumeur induisant) qui s’intègre dans le génome de la cellule végétale hôte. Le nouvel ADN formé déclenche une production autonome de l’acide indole-acétique qui joue un rôle dans l’élargissement des cellules et les cytokinines qui favorisent la division cellulaire (Penyalver et al., 2000).

Etat de connaissance des agriculteurs aux ravageurs et maladies microbiennes 

Devant les phytopathologies recensées dans la région de Tadal-Azillal, nous avons évalué le degré de connaissances des agriculteurs vis-à-vis les ravageurs et les maladies d’origines microbiennes qui affectent les oliviers. D’un autre coté, nous avons voulu savoir si les méthodes de lutte sont adoptées. Ainsi, parmi 103 agriculteurs responsables aux vergers d’oliviers recrutés dans notre étude, 68 agriculteurs, soit 66,02%, qui ont répondu au questionnaire. 82,82% de ces agriculteurs coopérateurs ont des connaissances sur la présence des ravageurs et maladies microbiennes d’olivier, dont l’œil de paon, le psylle et la verticilliose étaient les phytopathologies les plus mentionnées. Néanmoins, seulement 48,52% de ces agriculteurs coopérateurs ont déclaré l’adoption d’un traitement phytosanitaire contre 51,48% n’emploient aucun traitement (Figures 3 et 4).

Figure 3:

Figure 4:

A l’encontre, aucun agriculteur ne pratique la lutte biologique contre les ravageurs d’olivier, ni emploie les extraits de plantes et/ou de microorganismes qui sont moins toxiques et non polluantes à l’environnement en comparaison avec les pesticides utilisés dans le traitement phytosanitaire pour faire face aux maladies d’origine microbienne (Zahir, 2016).

Par ailleurs, certains agriculteurs ont mentionné qu’ils adoptent des méthodes pour le suivi et le contrôle des maladies par des observations continues des fruits, feuilles, rameaux et les branches notamment durant les périodes humides. D’autres emploient une taille des oliviers accompagnée de l’incinération du bois de taille et suivie d’un traitement chimique telles que les précautions prises vis-à-vis la bactériose de l’olivier indiquées par Benjama, (2003). L'élagage est également effectué avec soin pendant la saison sèche, afin d'enlever les nœuds des rameaux. Tandis que d’autres ont recours à l’élimination des plantes vectrices comme moyens de prévention et prophylaxie contre la verticilliose. Incontestablement, le champignon Verticillium dahliae est capable de résister plusieurs années dans le sol et de se perpétuer par l’intermédiaire de plantes vectrices (Afidol Association Française Interprofessionnelle de l'Olive, 2017).

D’un autre coté, pour une bonne gestion phytosanitaire, il est important de mentionner que les agriculteurs doivent être formés pour disposer d’une qualification professionnelle ou avoir un personnel technique qualifié pouvant conduire toutes les opérations de production dans de bonnes conditions. Ils doivent également avoir du matériel nécessaire pour l’entretien et la protection des plants (APP, 2010).

Conclusion

L’activité d’oléiculture dans la région Tadla-Azilal occupe une place importante dans les plantations fruitières exercées dans la région et elle représente 12% de la production oléicole nationale. Durant la période de notre étude, nous avons identifié que les vergers d’oliviers de cette région, abritent deux maladies d’origine fongiques et une maladie d’origine bactérienne. Ces espèces phytophages, peuvent causer des dégâts importants, tant sur le plan quantitatif que qualitatif en présentant ainsi une menace potentielle sérieuse pour les oliveraies de la région.

Selon leurs degrés d’importance, la maladie de la tavelure (91,30%) est la plus prédominante dans la région suivie de la verticilliose (65,21%) et la tuberculose bactérienne d’olivier (13,04%). La répartition géographique des foyers identifiés est variable d’une maladie à l’autre et d’une région à l’autre. Par ailleurs, l’évaluation des connaissances des agricultures de la région vis-à-vis les maladies d’origine microbienne et les méthodes de lutte révèle que presque la majorité (82,82%) de ces agriculteurs ayant des connaissances sur les ravageurs et maladies microbiennes et confirment l’identification de ces agents au niveau de leurs vergers d’oliviers. D’ailleurs, 48,52% des agriculteurs déclarent l’adoption d’un traitement phytosanitaire contre 51,48% ne traitent pas les ravageurs et maladies.

Or, ces phytopathologies doivent être suivies, traitées et contrôlées en limitant la propagation des agents causaux dans autres oliveraies encore indemnes par l’ensemble des agriculteurs en collaboration avec plusieurs acteurs dont le ministère d’agriculture et les instituts nationaux de la recherche agronomique. Ceci dans l’objectif de préserver, d’une part, l’olivier comme patrimoine régional d’excellence et, d’autre part, d’éviter des imperfections inacceptables de la production qui risqueraient au Maroc de perdre sa place comme le deuxième producteur mondial d’olive de conserve et le sixième producteur mondial d'huile d'olive.

Ainsi, comme perspectives de cette étude préliminaire, ce travail peut déboucher sur d’autres axes de recherches à savoir :

L’isolement et identification moléculaire des espèces microbiennes responsables des maladies l’œil de paon, la verticilliose et la tuberculose bactérienne d’olivier.

Évaluation de l’effet antimicrobien in vitro et in vivo de plusieurs extraits (aqueux et organique) et huiles essentielles des plantes médicinales et aromatiques marocaines contre les différents agents causaux isolés responsables des dites phytopathologies.

Purification des principes actifs des plantes d’intérêt en vue de développer des bio-pesticides non toxiques et non polluants à l’environnement.

Références

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Publié-e

16-09-2020

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Rubrique

Protection des Cultures