Les antagonistes naturels d’Heterodera avenae dans diverses conditions de cultures de céréales en Algérie

Auteurs-es

  • Djamel SMAHA Institut National de la Protection des Végétaux, Alger
  • Fouad MOKRINI National Institute for Agricultural Research (INRA), Agadir, Morocco
  • R. DAOUDI-ASSOUS M'Hamed Bouguerra University, Boumerdès, Algeria
  • A. ADIMI M'Hamed Bouguerra University, Boumerdès, Algeria
  • A. MOKABLI University of Khemis Miliana, Ain Defla, Algeria
  • A. DABABAT International Maize and Wheat Improvement Center (CIMMYT), Emek, Ankara, Turkey

Résumé

Un travail de recherche a été conduit pour mettre en évidence la diversité de la microflore associée au nématode à kyste des céréales, Heterodera avenae, dans quatre régions céréalières d’Algérie. L’isolement des micro-organismes associés a visé principalement les champignons inféodés aux kystes. L’isolement a abouti à l’identification de six champignons: Fusarium spp., Penicillium spp., Verticillium spp., Rhizomucor spp., Rhizopus spp. et Ulocladium spp. Dans toutes les régions prospectées, Fusarium sp. est le plus fréquemment associé aux kystes. La diversité la plus élevée est observée à Dahmouni avec les genres Aspergillus spp., Ulocladium spp., Rhizopus spp. et Rhizomucor spp. L’essai in vitro a montré que les métabolites de Fusarium spp., Penicillium spp.et Aspergillus spp. parasitent à un taux élevé les œufs et constituent ainsi des agents potentiels de lutte contre H. avenae.

Mots-clés: Antagonistes, champignons, bactéries, métabolites, nématode à kyste, lutte biologique

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INTRODUCTION

Le nématode à kyste, Heterodera avenae Woll., est un endoparasite sédentaire des racines des céréales. En Algérie, cette espèce a été rapportée par Scotto La Massese en 1961. Ensuite, plusieurs études ont montré la présence d’H. avenae dans plusieurs régions céréalières, à savoir Dahmouni (Tiaret), Djendel (Aïn Defla), Ain Azel (Sétif), Oued Fodda (Chlef), Hmadna (Relizane) et Hachimia (Bouira) (Mokabli et al., 2001; Smaha et al., 2014; Tirchi et al., 2016; Smaha et Mokabli, 2017; Djetti et al., 2018) où les degrés d’infestation étaient plus ou moins importants. La rotation culturale et l’utilisation de variétés résistantes constituent les moyens actuels de lutte. D’autres alternatives comme la lutte biologique sont à examiner avec pour candidats les antagonistes naturels de ce nématode.

La première mise en évidence de la régulation naturelle des populations d’H. avenae a été réalisée sur des monocultures des céréales en Angleterre (Collingwood, 1962) où ce phénomène est très répandu comme dans d’autres pays de l’Europe septentrionale (Kerry et al., 1982b; Stirling, 1991). Les plus importants champignons parasites d’H. avenae sont Nematophthora gynophila Kerry et Crump et Pochonia chlamidosporia (Goddard) Zare, Gams et Evans (=Verticillium chlamydosporium Goddard) (Kerry, 1982). Au Pérou, le contrôle de Meloidogyne incognita a été assuré par l’application du champignon Paecilomyces lilacinus (Thom) dans des sols infestés par ce nématode (Jatala et al., 1980). Nematophthora gynophila infeste les femelles et inhibe la formation des kystes. Verticillium chlamydosporium parasite aussi bien les œufs immatures que les L1 ou L2 enchorionnées (Irving et Kerry, 1986). Ces deux champignons contribuent ainsi à une diminution de l’inoculum du nématode dans le sol qui est généralement efficiente après 3 à 5 années de monoculture (Jaffee et al., 1992a,b; Kerry et Crump, 1998). Jaffee et al., (1993) ainsi que Kerry et Crump (1998) ont modélisé les relations quantitatives entre les champignons parasites ou nématophages et leurs hôtes qui conditionnent l’efficacité de ces interactions. La stratégie «conservatrice» de lutte biologique consistant à favoriser la régulation naturelle des populations du nématode est progressive et ne s’établit dans le sol qu’à long terme; ce qui rend difficile son application. On peut lui substituer la stratégie «inondative» par inoculations artificielles de ces agents biologiques déjà présents dans le sol et préalablement multipliés sur milieu artificiel, en vue de combattre, au moment opportun, les nématodes (Kerry et Crump, 1998).

Cette étude a pour but: i) d’isoler et d’identifier les antagonistes biologiques potentiels des kystes d’H. avenae provenant de différentes régions céréalières d’Algérie; ii) de déterminer la toxicité de Fusarium spp., Penicillium spp. et Aspergillus spp. à l’égard des œufs d’H. avenae.

MATÉRIELS ET MÉTHODES

Localités, échantillonnage et extraction des nématodes

L’échantillonnage du sol de céréales naturellement infesté par H. avenae est effectué dans quatre régions localisées dans deux étages bioclimatiques différents: Sidi Amar (Tipaza) et Mouzaia (Blida) en sub-humide, Khroub (Constantine) et Dahmouni (Tiaret) en semi-aride.

Ces étages bioclimatiques se distinguent par les températures et les précipitations moyennes annuelles. À l’étage bioclimatique sub-humide, la température moyenne annuelle est de 19°C et les précipitations moyennes annuelles varient de 600 à 800 mm. À l’étage bioclimatique semi-aride, la température moyenne annuelle est de 7°C en hiver et 27°C en été avec une moyenne annuelle de 17°C et une pluviométrie annuelle de 350 mm.

Les échantillons de sol de céréales (blé dur, blé tendre et orge) sont collectés entre juillet et août à partir de douze parcelles: quatre dans la commune de Sidi Amar, trois dans la commune de Dahmouni, trois dans la commune de Khroub et deux dans la commune de Mouzaia. L’échantillonnage est effectué à une profondeur entre 0 et 30 cm à l’aide d’une tarière (Rivoal, 1986). Une dizaine d’échantillons de sol sont prélevés dans chaque parcelle et chaque échantillon est constitué de cinq prises élémentaires. Tous les échantillons sont emballés dans des sacs en plastique sur lesquels les coordonnées du prélèvement sont mentionnées (date et numéro de la parcelle) puis stockés à 4°C. Au laboratoire, le sol est préalablement séché à l’air libre. L’extraction des kystes est effectuée avec l’appareil de Fenwick (1940).

Isolement et identification des champignons

L’isolement des champignons est effectué sur une quinzaine de kystes désinfectés dans une solution de NaOCl à 1% pendant cinq minutes et rincés trois fois successives avec de l’eau distillée stérile (le premier rinçage à 2 minutes, le deuxième à 3 minutes et le troisième à 5 minutes). Les kystes sont alors séchés pendant 10 minutes sur du papier Wattman stérile. Ils sont ensuite placés dans des boîtes de Pétri de 90 mm diamètre sur milieu Malt gélosé (20 g d’extrait de malt, 10 g d’agar et 1 litre d’eau distillée) (Rappily, 1968), à raison d’un kyste par boîte. Quinze répétitions sont donc réalisées pour chaque commune. Toutes ces manipulations sont réalisées sous hotte à flux laminaire afin d’éviter les contaminations externes. Après 72 heures d’incubation à 25°C, les boîtes sont examinées sous loupe binoculaire toutes les 24 h pendant les dix premiers jours, une fois par semaine ultérieurement. Au bout d’un mois, le pourcentage d’infection des kystes par les champignons a été calculé. Les champignons, qui se sont développés à partir des kystes, ont été isolés et purifiés sur milieu gélosé. A partir de ces isolats, des cultures monosporales sont réalisées sur milieu Malt et incubées à 25°C.

L’identification des champignons isolés est faite sur la base des critères macroscopiques et microscopiques. Les observations macroscopiques concernent la couleur et l’aspect de la culture. Les observations microscopiques (optique de type Leica BM) sont faites sur des fragments de culture contenant les formes de fructification, colorées au bleu de lactophenol, placées entre lame et lamelle et fixées par un passage rapide sur la flamme du bec benzène. Les observations concernent la morphologie du mycélium, des conidies, des conidiophores et des chlamydospores. Les genres des différents champignons isolés sont identifiés selon la clé de Barnett et Hunter (1978).

Isolement et purification des bactéries

L’isolement des bactéries a été effectué de la même manière que pour les champignons. Les colonies bactériennes sont purifiées et enrichies par réensemencement sur le milieu LPGA (5 g de peptone, 5 g de levure, 10 g de glucose, 15 g d’agar et 1 litre d’eau distillée), selon la méthode en stries à l’aide de pipette Pasteur, puis elles ont été incubées à une température de 27 °C pendant 24 à 48 h. Ensuite, les boîtes de Pétri des différentes populations d’H. avenae sont examinées à l’œil nu, où nous observons alors des colonies bactériennes distinctes en couleurs et en aspect. Elles ont subi par la suite plusieurs tests tels que le Test de potasse indicatrice de GRAM, Test Oxydase et Test Hugh et Leifson (Schaad et al., 2001). Conservées au froid, les cultures bactériennes n’ont pas été identifiées.

Préparation des filtrats fongiques

Trois souches de Fusarium spp. (M2, M9 et M12), deux souches de Penicillium spp. (SA5 et SA9) et deux souches d’Aspergillus spp. (D3 et EK14) isolées à partir des kystes appartenant aux populations respectives de Mouzaia (M), Sidi Amar (SA), Dahmouni (D) et El Khroub (EK), ont été évaluées pour leur toxicité à l’égard d’H. avenae.

Un fragment de chaque isolat fongique est prélevé dans la zone de croissance de culture et déposé dans des flacons de 250 ml contenant 100 ml de milieu nutritif liquide YES (composé de 40 g de saccharose, 20 g d’extrait de levure et 1000 ml d’eau distillée). Ces fioles sont mises à incuber pendant 14 jours à l’obscurité à une température de 26°C. Après ce délai, le milieu de culture est filtré en utilisant du papier Wattman de diamètre

11 mm, ce qui évite le passage de tous les contaminants. L’effet nématicide est testé avec le filtrat aqueux qui est dilué dans de l’eau distillée stérile à 25, 50 et 75%. L’eau distillée stérile est utilisée comme témoin pour la comparaison.

Analyse des filtrats de culture fongique

L’identification des métabolites toxiques dans le filtrat de cultures fongique est réalisée grâce à la chromatographie en couche mince (CCM) qui est basée sur la migration différentielle de molécules en fonction de leur taille, forme, masse, charge, solubilité ou leurs propriétés d’absorption. Après 14 jours d’incubation, nous nous débarrassons de la biomasse formée en filtrant le milieu YES à travers un papier filtre. Ainsi, 50 ml du filtrat obtenus sont additionnés respectivement à 100, 50 et 30 ml de chloroforme. L’ensemble est agité pendant 30 minutes. Nous laissons ensuite le mélange décanter en utilisant une ampoule à décantation dans le but de séparer la phase aqueuse de la phase chloroformique. Les trois phases chloroformiques ainsi extraites sont filtrées sur un papier filtre puis concentrées à l’aide d’un rota-vapeur jusqu’à obtenir un volume de 2 à 3 ml. Ces extraits sont conservés à l’abri de la lumière à 4°C jusqu’à leur utilisation.

Toxicité des filtrats fongiques sur les œufs d’H. avenae

Les œufs d’H. avenae sont déposés dans des tubes à hémolyse. Chaque tube reçoit 100 œufs environ auxquels nous ajoutons une suspension des filtrats à tester de 100 µl de chaque souche de Fusarium sp., Penicillium spp. et Aspergillus spp. pour les trois concentrations (C1: 25%, C2: 50%, C3: 75%). Les œufs sont donc soumis à quatre traitements différents (témoin, Fusarium sp., Penicillium spp. et Aspergillus spp.). Chaque traitement est répété quatre fois. La mortalité des œufs est évaluée après 6, 24 et 48 heures d’incubation à 22°C, par des colorations périodiques au bleu de Meldola à 1‰ qui a la particularité de traverser la cuticule des œufs morts et d’en colorer le contenu (Ogica et Estey, 1974). Ensuite, les œufs colorés et non colorés sont dénombrés sous microscope optique.

Analyse statistique

Afin d’étudier la corrélation entre les genres des champignons isolés avec les populations d’H. avenae étudiées, nous avons utilisé une analyse multifactorielle à partir d’un logiciel statistique (PAST vers.1.37) (Hammer et al., 2001).

RÉSULTATS

Champignons isolés

Quarante-six champignons ont été isolés et identifiés essentiellement au niveau du genre. Ils appartiennent à la classe des Zygomycètes (Rhizopus spp. et les Rhizomucor spp.) et des Deutéromycètes (Aspergillus sp., Fusarium sp., Penicillium sp. et Ulocladium sp.) (Figure 1).

En se basant sur des critères morphologiques, le conidiophore d’Aspergillus spp. se termine par un renflement pourvu de stérigmates portant des chaînettes de conidies unicellulaires et globoïdes (Figure 1 A). Fusarium spp. se caractérise par des macroconidies pluricellulaires légèrement arquées et des microconidies unicellulaires ovoides à oblongues (Figure 1B). Penicillium spp. se caractérise par des conidiophores prolongés de phialides qui portent à leur apex de longues chaînettes de conidies unicellulaires, globoïdes à ovoides (Figure 1C). Rhizomucor spp. présente des hyphes non cloisonnés ou peu cloisonnés et les zygospores sont formées dans les hyphes aériens, ronds et de couleur brun foncé à noir (Figure 1D). Rhizopus spp. se caractérise par des hyphes non septés, des conidiophores à croissance continue qui donnent naissance à des sporanges (Figure 1E). Le conidiophore d’Ulocladium spp. est simple et ramifié et les conidies présentent un aspect en zig-zag, de couleur brun-noire, avec une paroi rugueuse et cylindrique divisée en plusieurs cellules (Figure 1F).

Fréquence des champignons

Aspergillus spp., Penicillium spp. et Fusarium spp. sont les plus fréquemment associés aux kystes d’H. avenae récoltés dans les quatre régions prospectées. La diversité la plus élevée est observée à Dahmouni avec les genres Aspergillus sp., Ulocladium spp., Rhizopus spp. et Rhizomucor spp. qui seraient spécifiques à cette région (Figure 2). Le pourcentage le plus élevé de kystes infectés est enregistré à Mouzaia (87%) et il est le plus bas à El Khroub (60%). A part les trois genres Aspergillus spp., Penicillium spp. et Fusarium spp., tous les autres champignons ont été isolés avec une fréquence inférieure à 30%. Tous ces champignons sont considérés comme des parasites secondaires. L’analyse factorielle des composants (AFC) montre que l’axe 1 contribue pour 57,2% d’informations, alors que l’axe 2 totalise une contribution de 41,4% (Figure 3). L’AFC et la classification ascendante hiérarchique (CAH) font ressortir trois groupes. Le premier groupe correspond à la présence des genres Ulocladium spp., Rhizomucor spp. et Rhizopus spp. avec la commune de Dahmouni. Le second comporte le genre Fusarium spp. avec la commune de Mouzaia, alors que le troisième regroupe les genres Aspergillus spp. et Penicillium spp. avec les communes d’El Khroub et Sidi Amar.

Chromatographie en couche mince

Les résultats de la chromatographie en couche mince (CCM) se sont révélés positifs. En effet, la lecture des deux plaques CCM des différents isolats fongiques (Figures 4, 5) a montré une présence de fluorescence bleu foncée et bleu claire qui signifie une migration des métabolites au niveau de la plaque de silicagel. En l’absence de standards, il nous a été impossible de réaliser la détermination des substances extraites à partir des champignons ayant subi une migration.

Toxicité des filtrats de cultures fongiques sur les œufs d’H. avenae

Nous constatons que le pourcentage de mortalité des œufs est de 100% pour toutes les concentrations des filtrats de champignons, et ce, 6 h, 24 h et 48 h après inoculation. Ces résultats sont nettement visibles sous microscope lorsque les œufs d’H. avenae sont colorés au bleu de Meldola à 1‰. En effet, dans le traitement par le filtrat de Fusarium spp. (M12) à la concentration C1 après 6 h, les œufs sont embryonnés colorés (foncé), non viables et non dégradés (Figure 6A). Dans le traitement par le filtrat de Fusarium spp. (M2) à la concentration C2 après 48 h, nous observons des œufs morts ou non viables colorés et présentant une ou plusieurs vacuoles (Figure 6B). Avec le filtrat d’Aspergillus spp. (D3) à la concentration C3 après 24h, les œufs sont colorés (foncé) avec des embryons dégradés (Figure 6C). L’application du filtrat de Penicillium spp. (SA5) à la concentration C2 après 6 h a abouti à la mortalité des œufs embryonnés qui sont colorés et non dégradés (Figure 6D). Toutes ces observations sont différentes par rapport à celles obtenues sur les témoins (eau distillée). Ces derniers présentent une mortalité nulle, étant donné que l’aspect des œufs après coloration au bleu de Meldola à 1‰ présente un contenu embryonnaire non coloré (Figure 6E).

DISCUSSION

Quarante-six champignons appartenant à des genres différents ont été identifiés à partir des kystes d’H. avenae de populations provenant de quatre régions céréalières. Ces champignons appartiennent à quatre ordres. Ce sont des opportunistes (Ownley et al., 1983; Dackman et Nordbring-Hertz, 1985). Les champignons opportunistes ou parasites secondaires sont représentés par les Zygomycètes tels que Rhizopus spp. et Rhizomucor spp. et plusieurs Deutéromycètes tels que Aspergillus spp., Fusarium spp., Penicillium spp. et Ulocladium spp.

Les champignons isolés dans notre étude se trouvent partout dans le monde en association avec plusieurs nématodes à kystes (Heteroderidae), ce qui suggère que cette microflore leur est spécifique (Willcox et Tribe, 1974; Kerry et Crump, 1977; Kerry, 1980; Nigh et al., 1980; Ownley Gintis et al., 1983; Crump et Kerry, 1987; Crump, 1991; Crump et Flynn, 1995; Chen et al., 1996). Selon Kerry et al., (1982 b), les opportunistes comme Penicillium spp. n’infectent qu’un nombre faible d’œufs et ne colonisent que les femelles mortes. Il est à noter que certains des champignons isolés sont associés aux céréales.

Tous les champignons isolés des quatre régions algériennes prospectées ont une fréquence qui varie entre 13 et 66% et sont considérés comme des parasites secondaires (Dackman et Nordbring-Hertz, 1985; Kerry, 1988b). L’association de Fusarium spp. avec H. avenae suggère que ce champignon a vraisemblablement un rôle dans la régulation naturelle des populations de ce nématode. Sa fréquence la plus élevée dans la région de Mouzaia pourrait résulter de conditions bioclimatiques favorables à son développement et surtout de la monoculture des céréales (blé ou orge) qui y est pratiquée.

Cependant, certains d’entre eux ont fait l’objet de nombreux travaux. Ils ont montré une action inhibitrice vis-à-vis de la mobilité des larves infestantes (L2) des nématodes à galles ou à kystes. Selon Kerry (1988a), plus de 150 espèces de champignons ont été identifiées sur les kystes, les femelles et les œufs de huit espèces de nématodes à kystes dans le sol, alors qu’une vingtaine d’espèces ont été trouvées sur les œufs de Meloidogyne spp. (Chen et al., 1996). Le taux de 76% de colonisation de kystes obtenu dans notre expérimentation corrobore les résultats révélés par Clovis et Nolan (1983) et Tribe (1980) qui estiment que le taux des kystes, œufs et femelles de nématodes à kystes colonisés par les champignons dans les sols agricoles varie entre 10 et 90%.

La colonisation des kystes, œufs ou femelles par ces champignons peut affecter leur viabilité, ce qui peut expliquer la mortalité des œufs dans les kystes des différentes populations étudiées. Ainsi, Nigh et al., (1980) rapportent qu’il existe des rapports qui indiquent que la viabilité des nématodes était fortement réduite après avoir été colonisés par certains champignons opportunistes.

Au niveau des sols, les populations des champignons opportunistes associés aux nématodes peuvent être significativement plus élevées que les populations des champignons parasites obligatoires (Yu, 1989). L’importance de la régulation des populations des nématodes parasites des plantes dans le sol est positivement liée à la population de tous les parasites fongiques, y compris les opportunistes (Kerry, 1988b).

En conditions de laboratoire, nous avons démontré la toxicité de trois souches de Fusarium spp., de deux souches de Penicillium spp. et de deux souches d’Aspergillus spp. à l’égard d’H. avenae qui provoque une mortalité élevée des œufs du nématode. La mortalité induite par les filtrats de ces sept souches de champignons constitue donc un potentiel majeur dans le cadre de la lutte contre ce nématode. En effet, les travaux de Ciancio, (1995), Anke et Sterner, (1997), Nitao et al., (2001) ont mis en évidence la toxicité des métabolites secondaires produits par les champignons endophytes, tels que Fusarium oxysporum sur Meloidogyne incognita, ainsi que les toxines de divers Fusarium spp. qui peuvent réduire la viabilité des nématodes. Djian et al., (1991) ont montré qu’il s’agit d’acide gras volatil monocarboxylique qui est l’acide acétique qui est produit abondamment durant la croissance des champignons telluriques tels que Paecilomyces lilacinus et Trichoderma longibrachiatum sur milieu liquide et qui inhibent la mobilité des larves infestantes et l’éclosion des œufs des nématodes.

Les filtrats de culture de Fusarium spp., Penicillium spp. et Aspergillus spp. agissent soit par l’action toxique vis-à-vis des œufs d’H avenae, soit par l’action inhibitrice d’éclosion ou destructrice des œufs de populations de nématodes (Ameen, 1991; Hallman et Sikora, 1996; Khan, 1999; Sharma, 1999; Wang et al., 1999; Costa et al., 2000, 2001; Randhawa et al., 2001). Des résultats proches aux nôtres ont été obtenus par Molina et David (1986). Ces deux auteurs ont montré que l’extrait purifié de Penicillium spp., Penicillium oxalicum et Penicillium anatolicum Stolk présente une activité nématicide à 100 et 200 ppm.

L’efficacité des champignons pourrait donc résulter d’un effet toxique qui confirme les résultats de plusieurs travaux qui ont montré l’intérêt de ces agents antagonistes dans la lutte contre les nématodes phytoparasites.

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Publié-e

15-01-2020

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Rubrique

Protection des Cultures