Diversité des abeilles sauvages de la Réserve de Biosphère de Luki (RD Congo)

Auteurs-es

  • Tresor BAKAMBANA Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université de Kinshasa, RDC
  • Joseph LUMANDE Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université de Kinshasa, RDC
  • Julien PUNGA Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université de Kinshasa, RDC
  • Erick BUKAKA Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université de Kinshasa, RDC
  • Hyacinthe LUKOKI Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université de Kinshasa, RDC
  • Jonas NAGAHUEDI Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université de Kinshasa, RDC

Résumé

Les abeilles sont les pollinisateurs les plus nombreux de la plupart des cultures et des plantes sauvages, leur état actuel de connaissance en RDC s’avère très fragmentaire. En vue d’actualiser les connaissances dans ce domaine, il a paru nécessaire de réaliser une étude avec comme objectif d’inventorier et d’évaluer la diversité d’abeille sauvages dans la Réserve de Biosphère de Luki précisément dans la zone de transition. Au moyen des pièges coupelles et des filets entomologiques, les abeilles ont été échantillonnées durant 4 ans (2017, 2018, 2020 et 2021). Un total de 4843 individus a été capturé rattachés à 41 espèces, 3 familles et 5 sous familles. Après analyse, il se dégage que 3 familles ont été recensées avec prédominance de la famille des Apidae (4307 individus, 88,9 %), suivie de celle des Megachilidae (444 individus, 9,16 %). À l’échelle spécifique, Apis mellifera a enregistré la plus forte abondance avec 2584 individus, soit 53,4 %, suivie de Dactylurina staudingeri avec 508 individus soit 10,5 %. En termes d’occurrence, les assemblages Apoïdae sont dominés par des espèces très communes avec 19 espèces. En outre, la saison des pluies avait une influence significative sur l’abondance des abeilles sauvages dans la Réserve de Biosphère de Luki.

Mots clés: Biodiversité, Réserve de Biosphère de Luki, Abeilles, pollinisateur

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INTRODUCTION

Les abeilles, sont les pollinisateurs les plus nombreux de la plupart des cultures et des plantes sauvages, elles comptent plus de 20 000 espèces dans le monde appartenant à plusieurs dizaines de familles, comprenant des abeilles sauvages et une seule espèce d’abeille domestique (Potts et al., 2010; Pfiffner et Müller, 2016). L’état actuel de connaissance de la diversité des principaux insectes pollinisateurs, dont les abeilles sauvages en République Démocratique du Congo demeurent fragmentaires, avec quelques études à Kinshasa, Kongo-Central et Kisangani (Bukaka, 2011; Lokolo, 2011; Nzundu, 2014; Lukoki et al., 2020).

Depuis plusieurs décennies, nous assistons à une régression notable des populations d’insectes pollinisateurs en général et de l’abeille en particulier (Steffan-Dewenter et al, 2005; Rasmont et al., 2006; Haubruge et al., 2006). En effet, les causes de cette régression sont multiples et parfois individuelles. Ainsi, ces causes se classent en deux grandes catégories: les facteurs naturels et les facteurs environnementaux ou humains (Vanbergen et Garratt, 2013; Fabrice et Le Féon, 2016).

Cependant, une mortalité accrue des colonies d’abeilles a été signalé dans tous les continents au cours de ces dernières décennies (Reza, 2009). En 2006, le terme de «syndrome d’effondrement des colonies» (CDC: Colony Collapse Disorder) a fait son apparition, décrivant ce phénomène inexpliqué et de grande ampleur (Ballis, 2013). Ce syndrome a conduit à la fragilisation du cheptel apicole mondial (Haubruge et al., 2006; Ballis, 2013; Oldroyd, 2007; Reza, 2009)

Ce déclin entraîne plusieurs répercussions entre autre, la diminution de la production agricole, et par suite, une augmentation des prix agricoles (INP, 2011). Ainsi, le contrôle de cette situation ne pourra se faire qu’au prix d’une connaissance sur ces principaux pollinisateurs. En raison de l’importance économique des plantes cultivées et de l’état actuel de connaissance des principaux insectes pollinisateurs, dont les abeilles sauvages, il nous a paru nécessaire de mener une étude sur ces pollinisateurs dans le Kongo Central, particulièrement dans la zone de transition de la Réserve de Biosphère de Luki. Ainsi donc, le présent travail a visé l’objectif de déterminer la diversité spécifique des abeilles sauvages afin d’actualiser leur connaissance dans la faune entomologique de la République Démocratique du Congo.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Milieu d’étude

La Réserve de Biosphère de Luki située à l’ouest de la République Démocratique du Congo, au sud-est du Mayombe, dans la province du Kongo-Central constitue notre milieu d’étude. Elle a une superficie de 33 000 ha, et s’étend sur les latitudes 5°30’-5°45’S, et les longitudes 13°7’-13°45’E. Elle est en outre située à 120 km environ à l’Est de la côte atlantique et à 30 km au Nord de la ville portuaire de Boma et 125 km de la ville de Matadi. Elle s’étend sur trois (3) zones administratives: Seke-Banza, Lukula et Moanda.

Comme les autres aires protégées, la Réserve fut organisée en trois zones classiques (Figure 1), à savoir: Une aire centrale (11.931 ha), à protection intégrale; Une zone tampon (20.783 ha), dans laquelle se situent les enclaves villageoises, la station MAB/INERA et les sites d’interventions forestiers (Blocs d’expérimentation UB et UH); et Une zone de transition où sont exercées les activités des paysans riverains.

Méthode d’échantillonnage

Les abeilles ont été capturées durant 4 ans précisément en 2017, 2018, 2019 et 2021 dans la Réserve de Biosphère de Luki précisément dans la zone de transition et dans 3 habitats différents (forêt, savane et culture). Ainsi, pour chaque année, 4 sorties ont été réalisées en raison de deux sorties par saison. Cependant, les visites démarraient de 9h00 à 16h00. Cet intervalle est fixé pour couvrir au maximum les heures de pics d’activité des pollinisateurs (Geroff et al., 2014; Gezon et al., 2015; Fijen et Kleijn, 2017).

Pour capturer ces abeilles, deux méthodes d’échantillonnage, dites «active» et «passive», sont mises en place. Il nous a été préférable de coupler les deux méthodes pour une évaluation complète de la richesse spécifique, afin de limiter le biais observateur de la méthode au filet et le faible taux de capture de certaines abeilles (Westphal et al., 2008; Nielsen et al., 2012).

La première méthode «active» a consisté à parcourir les six transects décrits au dispositif expérimental (Figure 2) avec un filet entomologique mesurant 35 cm de diamètre, environ 1 m de manche en bois et une poche d’environ 50 cm de profondeur. Cette technique permet d’enregistrer les interactions plantes-pollinisateurs en récoltant les individus en train de butiner. La capture au filet a comme avantage de pouvoir capturer les grosses espèces d’abeilles sauvages peu présentes dans les coupelles mais dépend fortement de l’expérience du récolteur.

La deuxième méthode «passive», a consisté à placer 12 jeux des coupelles rondes en plastique de trois couleurs (jaune, blanche et bleue) de 16 cm de diamètre et de 5 cm de hauteur. Les abeilles sont attirées par les couleurs reflétant les ultra-violets et ces trois couleurs maximisent les possibilités de capturer une grande gamme de pollinisateurs (Westphal et al., 2008; Heneberg et Bogusch, 2014).

Avant de poser les pièges, chaque coupelle est remplie avec de l’eau savonnée inodore pour ne pas biaiser l’attractivité des coupelles. Le savon permet de diminuer la tension de surface de l’eau et donc de faire en sorte que les abeilles ne puissent pas en ressortir (Westphal et al., 2008). La solution savonneuse permet quant à elle de rompre la tension de surface et d’enrober l’insecte pour qu’il tombe au fond de la coupelle (Roulston et al., 2007). La combinaison des deux types de capture fournit une complémentarité qui permet de couvrir un large spectre d’espèces présentes sur le site (Westphal et al., 2008).

Dispositif expérimental

Dans chaque parcelle sélectionnée aléatoirement en fonction de la disponibilité de plantes à fleur, l’ensemble de ces techniques ont été installées sur base du dispositif présenté à la figure 3. Ainsi, six transects ont été définis et sur ces transects, les coupelles ont été installées séparées de 10 m d’intervalle dans les 1er, 3e et 5e transects. Et les captures au filet ont été réalisées le long de trois autres transects (2e, 4e et 6e) adjacents aux trois premiers afin de ne pas perturber la communauté échantillonnée par la technique précédente.

Conservation et identification

Les abeilles capturées sont conservées dans l’alcool à 70 % contenu dans une fiole (flacon) et acheminés au laboratoire. Une fois au laboratoire, ces dernières ont subi un lavage et ont été plus tard étalés à l’aide des épingles entomologiques dans des boîtes entomologiques pour faciliter l’identification. Celle-ci a été faite à l’aide du catalogue des abeilles de la région afrotropicale (Eardly et Urban, 2010). Elle a ensuite été complétée en se basant sur des caractères morphologiques décrits dans différentes clés de systématique entomologique rencontrées en RDC et en Afrique (Pauly et Vereecken, 2013; Pauly, 2015; Pauly, 2016a; Pauly, 2016b; Pauly, 2017).

Analyse des données

Abondance et occurrence

L’abondance relative (AR): Elle représente le rapport entre le nombre d’individus (ni) d’une espèce et le nombre d’individus total (N) (Magurran, 2004). Elle est calculée par la formule suivante:

La fréquence d’occurrence (Occ): Elle a été calculée pour chaque espèce et quatre classes d’espèces sont distinguées: (i) espèces très accidentelles (Vac), dont la fréquence d’occurrence est moins de 10%, (ii) espèces accidentelles (Acc), la fréquence d’occurrence varie entre 10 et 24 %, (iii) espèces communes (Cmt), présentes dans 25-49 % des relevés, (iv) espèces constantes (Cst) présentes dans 50 % des relevés ou plus (Bigot et Bodot, 1973).

Diversité alpha

Indice de Shannon-Wiener: Permet de quantifier l’hétérogénéité de la biodiversité d’un milieu et d’observer son évolution au cours du temps (Blondel, 1979). Il est calculé par la formule suivant:

Avec: ni =le nombre d’individus dans le premier groupe taxonomique; N=le nombre d’individus dans la station.

Indice de Simpson: Il est essentiellement lié aux variations d’abondance entre espèces dominantes (Marcon, 2010). Il est calculé par la formule suivant:

Avec: Ni =nombre d’individus de l’espèce donnée; N =nombre total d’individus.

Indice d’Equitabilité de Piélou (E): Permet d’estimer la répartition des espèces au sein des relevés en évaluant la proportion des espèces dominantes et dominées (Marcon, 2010). Il est calculé par la formule suivante:

Avec: H’= Indice de Shannon; S= richesse spécifique

Richesse spécifique (S): Correspond au nombre total d’espèces que comporte le peuplement considéré effectivement présentes sur un site d’étude et à un moment donné (Hammer et al., 2001).

Diversité bêta

(i) Indice de similarité: Indice de similarité de Jaccards (βjac) est donné par la formule suivante: βjac = c / (a + b - c), où c est le nombre d’espèces communes, a est le nombre d’espèces dans la station 1, et b est le nombre d’espèces dans la station 2 (De Bello et al., 2007).

(ii) Groupement et ordination: Après avoir étudié si les communautés d’abeilles sont similaires ou pas, nous avons cherché à voir lesquelles sont les plus proches ou les plus éloignées en termes de composition d’espèces en fonction des années. Pour atteindre ce but, des matrices de distances basées sur la méthode de groupe apparié Euclidien (UPGMA) sont établies pour obtenir des groupements. Les groupements ont été réalisés avec le logiciel Past.

(iii) Répartition spatiale des individus: Permet de déterminer la configuration spatiale des individus. Nous avons la répartition régulière (ou distribution binomiale positive), lorsque I < 1; la répartition aléatoire (ou distribution de poisson), lorsque I = 1 et la répartition agrégative (ou distribution binomiale négative) I > 1. (Canard et Poinsot, 2004). Elle est calculée par la formule suivant:

Avec: S2=variance et x=moyenne

Analyse statistique

Les données ont été saisies en utilisant le logiciel Microsoft Excel 2016. Ces données ont été importées vers le logiciel R, Past, et Origin pour la réalisation des figures. Le test de student et ANOVA ont été réalisés au seuil de signification de 5%.

RÉSULTATS

Inventaire et composition de l’Apidofaune

Les résultats révélant l’ensemble des espèces collectées sont consignés dans le tableau 1.

Un total de 41 espèces rattachées à 3 familles et 5 sous-familles est inventorié dans la zone d’étude (Tableau 1). La famille des Apidae s’avère la plus riche en espèces (20 espèces, 48,8 % de la richesse totale), suivie par Megachilidae, avec 12 espèces (29,3%). Le nombre d’espèces de la famille restante est de 9 espèces, soit (21,9%) (Figure 4).

Évaluation de la biodiversité

Abondance et occurrence

Les résultats relatifs à l’abondance et la fréquence d’occurrence des espèces sont consignés au tableau 2.

Quant aux valeurs de la fréquence d’occurrence (Occ) des 41 espèces capturées, 19 espèces sont communes, 8 sont constantes: Xylocopa torrida, Meliponula sp1, Meliponula nebulata, Megachile bituberculata, Dactylurina staudingeri, Apis mellifera, Anthidium oblongatum et Amegilla sp.1,7 d’entre elles sont très accidentelles: Lasioglossum sp2, Lasioglossum sp3, Leuconomia candida, Megachile cincta, Megachile curtula, Nomia sp1, Patellapis sp3, et 7 autres accidentelles: Xylocopa hottentotta, Xylocopa imitator, Patellapis sp2, Megachile brochidens, Megachile eurymera, Megachile biseta et Meliponula sp. (Tableau 2).

Parmi les 4843 individus capturés, la famille des Apidae est la plus représentée avec 4307 individus, soit 88,9 % du total, suivie par la famille de Megachilidae (444 individus, 9,16 %). La famille de Halectidae est la moins représentée avec 92 individus soit 1,89% (Figure 5).

À l’échelle spécifique, l’espèce Apis mellifera a enregistrée la plus forte abondance avec 2584 individus, soit 53,4 % du total, suivie de Dactylurina staudingeri (508 individus, 10,5 %) (Figure 6).

Évolution saisonnière des abondances

La figure 7 décrit la variation saisonnière du nombre de spécimens récoltés.

Sur base de la figure 7, il y a une différence significative entre les deux saisons en terme d’individus (t= -2,856; p<0,05).

Évolution annuelle des abondances

La figure 8 décrit la variation annuelle du nombre de spécimens récoltés.

Le Test d’ANOVA a indiqué qu’il n’y a pas une différence significative entre les différentes années en terme d’individus (p=0,2317).

Diversité alpha

Indices de diversité de Shannon (H’)

Les figures 9 et 10 ci-dessous présentent les valeurs de l’indice de Shannon et celle de la diversité maximale obtenues en termes d’année et d’habitats.

Au regard des figures 9 et 10, les valeurs obtenues de l’indice de Shannon tant pour les années que les habitats sont inférieures à 2,15 bits. Quant aux années, 2019 a présenté une valeur légèrement supérieure aux autres et la savane légèrement supérieure quant aux habitats. Ainsi, de manière générale, la diversité tant en année qu’en habitat trouvée dans cette étude est faible car, étant très éloignée de la diversité maximale.

Indice d’équitabilité (E)

Les figures 11 et 12 ci-dessous présentent les valeurs de l’indice de d’équitabilité en termes d’année et d’habitats.

Les valeurs de l’indice d’équitabilité confinées dans les figures 11 et 12 varient de 0,42 à 0,59 pour les différentes années et de 0,51 à 0,81 pour les différents habitats.

Indice de Simpson

Les figures 13 et 14 présentent les valeurs de l’indice de Simpson en termes d’année et d’habitats.

En termes d’années, la valeur de l’indice de Simpson la plus élevée a été enregistrée en 2019 avec 0,81. Quant aux habitats, la culture a présenté la valeur la pluie élevée soit 0,78. De plus, l’ensemble des valeurs obtenues étant supérieures à 0,5 et s’approchant de 1 à l’exception de 2017, montre que les individus sont repartis de manière régulière.

Richesse spécifique

Selon la courbe d’extrapolation à seize (16) relevés présentée à la figure 15, la richesse spécifique a atteint 41 espèces pour un total de 4843 individus.

La figure 15 indique l’apparition d’un grand nombre d’espèce entre la septième et onzième relevé et le plateau est atteint après le onzième relevé (Figure 15). Par ailleurs, la richesse cumulée tend asymptotiquement vers une valeur maximale. Ainsi, les coefficients de détermination des courbes logarithmiques, tendant vers 1, indiquent la tendance vers une stabilisation.

Diversité bêta

Les tableaux 3 et 4 décrivent la variation de la composition des communautés entre les différents habitats et en fonction des années.

Au regard de ce résultat, l’indice de similarité de Jaccard révélé une très faible similarité entre les années. Seules les années 2017-2018 et 2019-2021 sont similaires à plus de 50%. Deux groupes bien distincts ont été mis en évidence sur base de l’analyse du groupement basée sur le groupe apparié Euclidien. Le groupe 1, composé des 3 années, 2017, 2018, 2021 et le groupe 2 rassemble uniquement l’année 2019 (Figure 16).

Par ailleurs, l’indice de similarité Jaccard (βjac) a révélé une très faible similarité entre les 3 habitats (Tableau 4).

Répartition spatiale

Le tableau 5 montre la répartition spatiale d’abeilles récoltées dans la Réserve de Biosphère de Luki.

Au regard des résultats consignés dans le tableau 5, nous observons une répartition aléatoire des espèces Nomia sp1, Megachile cincta, Lasioglossum sp2, Lasioglossum sp3 et Leuconomia candida. Les espèces restantes se répartissent de manière régulière.

DISCUSSION

L’étude réalisée dans la zone de transition de la Réserve de Biosphère de Luki sur les abeilles a permis de recenser 4843 individus répartis sur 3 familles, 5 sous familles, 14 genres et 41 espèces. Au regard de ces résultats, il se dégage que les espèces récoltées appartiennent à trois familles, dont les Apidae, les Halictidae et les Megachilidae. Il se dégage en outre que les Apidés sont les mieux représentés avec 88,9% des observations totales, soit 4307 individus capturés répartis en 20 espèces. Ces derniers sont suivis des Megachilidés avec 444 individus, soit 9,16% d’observation avec 12 espèces identifiées. En effet, les Halectidés sont les moins représentés dans cette zone avec 1,89% d’observation, soit 92 individus repartis en 9 espèces. Les familles indiquées dans ce travail sont celles signalées dans plusieurs travaux effectués à Kinshasa et au Kongo-Central (Lukoki et al., 2020; Nzundu, 2014; Bukaka, 2011; Lokolo, 2011) et en Afrique subsaharienne (Eardley et al., 2010).

En termes d’abondance et de richesse spécifique, la différence est bien marquée entre les habitats (forêt, culture et savane). La Savane est l’habitat le plus visité par les abeilles avec plus de 97% d’observation, soit 4709 individus repartis en 39 espèces et 6 genres. Par ailleurs la culture et la forêt ont été faiblement été visitées avec 9 espèces chacune respectivement 95 et 39 individus capturés. Cette différence s’expliquerait par le fait que la savane était caractérisée par un grand nombre d’espèces en fleurs attirant ainsi les abeilles et que dans la forêt les fleurs étaient en hauteur empêchant la visibilité de ces abeilles. Ces constatations rejoignent celles de Lukoki et al. (2021) dans le même site qui pensent que les hyménoptères visitent plus les habitats ouverts.

De plus, vers la fin de la troisième année aucune nouvelle espèce n’a été observée et d’après la courbe de raréfaction, les captures nous ont permis d’obtenir une richesse spécifique suffisante. Par ailleurs, la courbe a atteint l’asymptote avec 41 espèces en 16 sorties avec un coefficient de détermination tendant vers 1 (R2=0,68) réduisant les possibilités de rencontrer les nouvelles espèces. D’après Ward et Ward (2001), plusieurs caractéristiques pourraient influencer le pouvoir de capture entre autre l’effet de la végétation environnante et la position du piège. Colwell (2013) rajoute que l’effort d’échantillonnage peut augmenter ou réduire la probabilité de rencontrer de nouvelles espèces dans un milieu.

Cependant, les résultats enregistrés dans ce milieu quant à la saison attestent que la saison des pluies aurait influencé l’activité des abeilles. Selon Bukaka (2011), cette situation s’expliquerait par le fait que la saison des pluies coïncide avec la floraison d’un grand nombre de plantes butinées par les insectes floricoles. En revanche le test d’ANOVA a indiqué qu’il n’y a pas une différence significative entre les différentes années en terme d’individus, ceci pourrait s’expliquer par les conditions environnementales qui n’a pas connu de variations au court de l’étude. Il se dégage en outre de cette étude que les espèces communes étaient majoritaires à côté d’espèces régulières. Cette situation se traduirait d’après Canard et Poinsot (2004) que les ressources utilisées par ces espèces sont distribuées de manière régulière.

Quant aux indices écologiques évalués, l’année 2019 se montre très remarquable tant pour l’indice de Shannon, d’equitabilité que de Simpson avec respectivement (5,18; 0,59; 0,81). De plus, de manière générale, la présente étude témoigne d’une diversité faible soit (H=1,89) très éloignée de la valeur obtenue pour la diversité maximale (H=5,36). L’indice de Simpson indique par ailleurs une valeur proche de 1 (soit 0,69) indiquant une régularité satisfaisante dans la distribution des individus entre les différentes espèces et la valeur d’équitabilité obtenue (E=0,51) renseignent que la quasi-totalité des effectifs est concentrée sur une espèce. Ces constations corroborent avec les résultats trouvés en renseignant que plus de 53% d’observation de concentre que sur Apis mellifera et Dactylurina staudingeri.

La diversité bêta quant à elle, analysée par l’indice de similarité de Jaccard et la classification hiérarchique, a exprimé une très faible similitude tant pour les années que pour les habitats prospectés dans cette zone. Conséquemment, dans l’ensemble de l’étude et quand à la période d’échantillonnage, seule l’analyse sur les années atteste que 2017-2018 et 2019-2021 présentent une similarité de 61,5%. D’après Amri et al. (2019), cette ressemblance résulterait de la structure et de la composition de ces insectes dans le milieu.

CONCLUSION

Afin d’étudier la diversité des communautés d’abeilles, qui est un groupe taxonomique et écologique important, une étude a été menée dans la zone de transition de la Réserve de Biosphère de Luki durant quatre ans allant de 2017, 2018, 2019 et 2021 avec une prospection dans trois habitats (forêt, culture et savane) en utilisant une capture par filet et coupelles colorées.

Les techniques utilisées ont permis de collecter 4843 individus, répartis inégalement sur 3 familles, 14 genres et 41 espèces. L’analyse a mis en évidence que les communautés des abeilles ont des compositions différentes avec dominance des espèces de la famille des Apidae, qui représentent 48,78% du total d’espèces récoltées.

L’analyse de deux niveaux de diversité, à savoir la diversité alpha et la diversité bêta, a révélé qu’il y a une différence bien marquée en termes d’abondance et de richesse spécifique entre les années et les habitats. De plus, la savane se relève être l’habitat le plus visité au regard des observations faites.

L’importante biodiversité des abeilles rencontrée dans cette réserve, exige de protéger ce type d’écosystème, vraisemblablement en danger, à cause de la pression anthropique, qui affecte leur stabilité. En plus, leur situation préoccupante exhorte une prise de conscience et une mise en action d’une politique locale sérieuse vis-à-vis de l’utilisation de la Réserve.

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Publié-e

17-12-2022

Numéro

Rubrique

Ressources Naturelles et Foresterie